Quebec bashing

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Le Quebec bashing est une attitude de dénigrement du Québec et des francophones qui l'habitent parfois trouvée dans le monde anglo-saxon, et plus particulièrement dans la presse canadienne d'expression anglaise, mais parfois aussi au Québec de la part de certains fédéralistes. Le Dictionnaire québécois-français propose comme équivalents : « dénigrement systématique du Québec », « critiques anti-Québec », « cassage de Québécois » ou « québécophobie », mais c'est le terme Quebec bashing qui paraît de loin être le plus utilisé. Bien que l'expression suive les règles d'usage de l'anglais, elle est surtout utilisée en français, dans des textes et des déclarations publiques de journalistes, politiciens et intellectuels québécois.

Le Quebec bashing a été dénoncé comme malhonnête[1] faux,[1], diffamatoire [2], empreints de préjugés[1][3], raciste,[4][5][6] ou comme de la propagande haineuse[7] par un grand nombre de Québécois de différentes origines ethniques [8], toutes tendances politiques confondues [9]. Le phénomene a aussi été dénoncé au Canada anglais[10],[11],[12].

Sommaire

[modifier] Contexte

Icône de détail Article détaillé : Histoire du Québec.

Bien que le français soit la langue d'une grande majorité de la population au Québec depuis le XVIIe siècle, la place réservée à la langue de la majorité dans le domaine de l'emploi, de l'affichage et des affaires est pratiquement inexistante, au profit de l'anglais, langue dominante au Canada depuis la conquête de 1760, graduellement devenue majoritaire après l'Union des deux Canadas imposée en 1840 par Londres après les Rébellions des Patriotes et la Upper Canada Rebellion. L'exclusion que subissaient les Canadiens (français) à l'époque impliquait un problème d'accès aux nouvelles terres ; c'est alors que commença l'exode qui pendant un siècle (1830-1930) fit quitter le pays pour les États-Unis à des centaines de milliers de gens. Les Patriotes réclamaient un gouvernement élu ("responsable"), puis en 1838, l'indépendance. Après l'Union, les Canadiens obtinrent le gouvernement élu ; LaFontaine et Baldwin obtinrent également la restitution des droits légaux du français. Ceux-ci devaient être reconnus encore en 1867. Mais dans la pratique, l'anglais dominait nettement au Québec, et son hégémonie était renforcé par une industrialisation axée sur le marché britannique et dominée par des capitaux anglo-saxons. Malgré les efforts de Honoré Mercier, premier minisitre de 1886 à 1893, qui se tourne vers des banques belges et françaises, le problème de l'accès au capital pour les Canadiens-français demeure. Les Caisses populaires seront un premier succès, mais c'est vraiment la création de la Caisse de dépôt en 1964 qui affranchira le gouvernement du Québec.

La rue Saint-Jacques de Montréal en 1935. Bien que le français soit la langue majoritaire au Québec depuis le XVIIe siècle, l'affichage unilingue anglais a prédominé dans la plus grande ville québécoise jusque dans les années 1970.
La rue Saint-Jacques de Montréal en 1935. Bien que le français soit la langue majoritaire au Québec depuis le XVIIe siècle, l'affichage unilingue anglais a prédominé dans la plus grande ville québécoise jusque dans les années 1970.

Jusqu'en 1960, l'anglais était la langue d'usage de la promotion sociale et de l'emploi, dans la plupart des secteurs de l'économie industrielle et commerciale, qui étaient entre les mains d'entreprises anglophones. L'anglais fut ainsi la langue d'intégration d'un demi-million de nouveaux arrivants, immigrés de l'Europe du sud et de l'Est au cours de la première moitié du XXe siècle. Cette situation d'infériorité des Canadiens-français se manifestait notamment dans des salaires moyens plus bas, leur absence complète des postes de supervision dans les entreprises et l'affichage commercial uniquement en anglais.

La mort du premier ministre Maurice Duplessis en 1959 et le début de ce qui sera appelé la Révolution tranquille marquera l'amorce d'un renversement de tendance. Le mouvement nationaliste québécois revendique le droit à pouvoir utiliser la langue de la majorité au travail et dans sa vie de tous les jours et demande la fin de l'anglicisation des populations nouvellement arrivées.

Ces revendications trouvent écho dans les rapports de la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme, mise en place en 1963 par le gouvernement fédéral canadien dirigé par Lester B. Pearson. Dans son rapport préliminaire, publié en 1965, la commission, connue sous le nom de Laurendeau-Dunton, note que les francophones vivant au Québec sont victimes de discrimination au plan économique, leur salaire étant de 35 % inférieur à celui des anglophones. Les Canadiens-français se retrouvent en 13e place sur 15 groupes ethno-linguistiques recensés.

L'arrivée au pouvoir du gouvernement du Parti québécois de René Lévesque en 1976 marqua un changement de cap dans la politique linguistique au Québec. L'adoption de la Charte de la langue française ou loi 101, qui impose l'usage du français dans toutes les sphères de la vie publique, y compris en matière de langue de travail et d'affichage commercial, tout en balisant certains droits de la communauté anglophone, est le mesure-phare du premier gouvernement péquiste. La Loi est dénoncée âprement par plusieurs groupes représentant la communauté anglo-québécoise ainsi que par la population et les médias du Canada, qui voient dans cette loi une contrainte inacceptable à leur liberté d'expression.

[modifier] Thèmes

De manière générale, un grand nombre de propos relevant du Quebec bashing soutiennent qu'il existe au Québec un fort courant de racisme et de discrimination à l'endroit des Québécois d'origine anglophone, des Autochtones et des minorités (par opposition à la population descendante des colons français qui ont peuplé le Québec à compter du XVIIe siècle que certains décrivent comme les «pure laine», appellation par ailleurs rejetée par plusieurs personnalités québécoises) [9][13].

Pour illustrer leurs propos, ces auteurs affirment qu'un fort sentiment anti-sémite a animé le Québec au cours de la première moitié du XXe siècle. Ces allégations sont souvent fondés sur certains écrits polémiques de l'historien Lionel Groulx et du leader fasciste Adrien Arcand[14]. Il est à noter qu'il n'y a pas de lien entre les deux - Groulx est un nationaliste québécois et catholique. Le Parti d'Arcand, marginal, est un parti pan-canadien et fait la promotion d'un nationalisme pan-canadien loyalement britannique, incorporant des éléments du racisme "aryen" du régime nazi. Plusieurs textes qualifiés de Quebec bashing feront un lien entre la société québécoise contemporaine, son gouvernement provincial et le mouvement souverainiste du Québec et l'idéologie fasciste, et en particulier avec le national-socialisme[13].

Certains auteurs s'attaquent aussi aux leaders politiques québécois. Durant les années 1990, les anciens premiers ministres du Québec Jacques Parizeau et Lucien Bouchard ont souvent été qualifiés de criminels [15][16], associés à des dictateurs de la trempe de Pol Pot[17] ou même au Diable.[5][18].

Les textes qualifiés de Quebec bashing dépeignent une vision très défavorable du nationalisme québécois, des partisans de la souveraineté du Québec et de la Charte de la langue française (loi 101). L'organisme public responsable de faire respecter la Charte, l'Office québécois de la langue française sera souvent qualifiée de "police linguistique" et condamnée pour ce que ces auteurs qualifient d'«oppression» des minorités anglophone et allophone. Reprenant le thème du national-socialisme, les fonctionnaires de l'OQLF seront traités dans le même souffle de membres de la Gestapo ou de chemises brunes[19][20].

Les auteurs de ces textes arguent généralement de la supériorité des Canadiens d'expression anglaise ou des conceptions anglo-saxonnes de la démocratie, de la liberté individuelle ou du multiculturalisme[4] ainsi que la grande tolérance du Canada anglais face à la dissension ou à la «trahison», ajoutant que seul un pays aussi accueillant que le Canada tolère de tels comportements. En fait, selon ces auteurs, seule l'appartenance du Québec au sein du Canada peut empêcher le Québec de sombrer dans le totalitarisme. [21]


[modifier] Citations

Les trois citations qui suivent sont tirées de ulaval.ca.

  • Regardez ce qui est arrivé au Canada, où les bilingualistes radicaux ont détenu le pouvoir au Québec. C'est maintenant une violation criminelle pour des sociétés de ne pas donner une facturation française égale avec l'anglais. Ils ont doublé la paperasserie, ont renforcé le coût de gestion des affaires et ont contraint les entreprises à sortir de la province.

« Look what happened in Canada, where radical bilingualists have held power in Quebec. It is now criminal offense for companies not to give French equal billing with English. It's doubled the paperwork load, driven up the cost of doing business and forced businesses out of the province. »
    — US English/English First''

  • Une majorité française force une minorité anglophone à instruire ses enfants en français.

« A French majority is forcing an English-speaking minority to educate its children in French. »
    — International Journal of the Sociology of Language (1986)

  • Je considère personnellement la législation québécoise comme une farce pour les droits linguistiques de l'homme, car elle nie l'accès des immigrants à l'anglais et les force à apprendre le français.

« I personnally find the Quebecois legislation a travesty of linguistic human rights, denying immigrants access to English and forcing them to learn French. »
    — International Journal of the Sociology of Language , Christina Bratt Paulston

  • « Pour beaucoup de Canadiens, le Québec est une réserve ethnocentrique peuplée de racistes qui bouffent les anglophones ramassés la veille par les SS de la loi 101. Hostiles à l'étranger, fermés sur eux-mêmes, ils vivent aux crochets des autres provinces et n'ont d'économie et d'entreprises que subventionnées par des politiciens fédéraux vendus. Ils maltraitent les aborigènes et volent l'électricité des pauvres Terre-Neuviens... »
        — L'actualité, Jean Paré

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

[modifier] Notes et références

  1. abc "Controverse autour du livre Oh Canada Oh Québec !" video, Archives, Société Radio-Canada, 31 mars 1992. Page consultée le 22 septembre 2006.
  2. "Un polémiste provocateur" video, Archives, Société Radio-Canada, 20 septembre 1991. Page consultée le 20 septembre 2006.
  3. Alexander Panetta. "Harper takes Wong to task for column". CNEWS, 20 septembre 2006. Page consultée le 20 septembre 2006.
  4. ab Normand Lester. Le Livre noir du Canada anglais. Éditions Les Intouchables, 2001, p.9, ISBN 2-89549-045-7
  5. ab "Les dérapages racistes à l'égard du Québec au Canada anglais depuis 1995" by Maryse Potvin, Politiques et Sociétés, vol. XVIII, n.2, 1999
  6. Michel Vastel. "Le racisme sournois du Globe & Mail"., Blogue de L'Actualité. 18 septembre 2006. Page consultée le 20 septembre 2006
  7. Brigitte Pellerin. "The ’Quebecistan’ question". in The Ottawa Citizen. 24 août 2006, Page consultée le 20 septembre 2006
  8. Jocelyne Richer. "Charest exige des excuses du Globe and Mail" Presse Canadienne, 19 septembre 2006. Page consultée le 20 septembre 2006
  9. ab Canadian Press. "Charest seeks Globe apology over notion culture a factor in school shootings". The Gazette, 19 septembre 2006. Page consultée le 20 septembre 2006
  10. "Harper complains to Globe about Jan Wong column" CTV, 20 septembre 2006, Page consultée 27 septembre 2006
  11. "Des propos antifrancophones à l'émission de Conan O'Brien" Radio-Canada, 13 février 2004, Page consultée le 29 septembre 2006
  12. "Wong's comments should have been removed: Globe editor" The Gazette, 23 septembre, 2006, Page consultée le 27 septembre 2006
  13. ab "Les « pures laines » coupables ?" par Antoine Robitaille, La Presse, 19 septembre 2006, page consultée le 21 septembre 2006
  14. Le Livre noir du Canada anglais by Normand Lester, Les Intouchables Editions, 2001, p.251-265, ISBN 2-89549-045-7
  15. Normand Lester. Le Livre noir du Canada anglais Éditions Les Intouchables, 2001, p.16. ISBN 2-89549-045-7
  16. Diane Francis. "Diane Francis: Books". Site web officiel de Diane Francis. Page consultée le 21 septembre 2006
  17. Normand Lester. Le Livre noir du Canada anglais Les Intouchables Editions, 2001, p. 21. ISBN 2-89549-045-7
  18. Normand Lester. Le Livre noir du Canada anglais. Éditions Les Intouchables, 2001, p. 17. ISBN 2-89549-045-7
  19. Diane Francis. "Quebec language policy isn't funny", in Financial Post, 11 avril 2000. Page consultée le 21 septembre 2006
  20. Michel David. "Bashing Quebec fashionable in anglo media", in The Gazette. 21 avril 2000. Page consultée le 20 septembre 2006
  21. Barbara Kay. "The rise of Quebecistan". in The National Post. 9 août 2006. Page consultée le 20 septembre 2006.
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