Psychologie clinique

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La psychologie clinique est née en France dans les années 1950 des apports de la psychanalyse qui lui a donné un de ses modèles de compréhension tant du fonctionnement psychique, en termes d'instances, topiques etc. que de ce qui s'y joue (transfert, identification, projection, clivage etc.). La visée en est la compréhension, en termes d'équilibre, des forces en présence (pulsions et défenses) et de signification inconsciente, des symptômes, traits de caractères ou comportements qui ont provoqué la consultation du psychologue. Deux méthodes, non exclusives, peuvent être utilisées : l'entretien clinique et les tests (projectifs et de niveau).

La psychologie clinique n'est pas exclusivement psychanalytique, elle est sous-tendue par d'autres théories. De plus, elle n'est pas à confondre avec la psychopathologie. En effet, cette dernière est plus restreinte, car elle se limite aux fonctionnements pathologiques.

Sommaire

[modifier] Historique

[modifier] Les précurseurs

Le courant clinique en psychologie s'est initié dans le sens de l'opposition à la pensée d'Auguste Comte, qui ne voyait dans la psychologie, aucune possibilité de scientificité, ceci par manque d'objet d'étude. Pour ce dernier, l'explication devait être cherchée soit du coté du biologique, soit du coté de la sociologie. John Stuart Mill est le premier à défendre une véritable scientificité de la psychologie, mais il ne peut répondre que de façon embarrassée à Auguste Comte[1], lui manquant une méthode plus objective.

Pierre Janet est donc le premier[2] à mettre en place une psychologie scientifique posée sur sa méthode d'analyse psychologique. Sigmund Freud suivra rapidement, ce qui donnera d'ailleurs des débats de priorités entre ces auteurs[3], avec sa conception de l'appareil psychique.

Plus tard, la contribution d'Henri Wallon, de Jean Piaget, mais également de Kurt Lewin seront également d'importance pour permettre une consistance à la psychologie clinique. En effet, tout ces auteurs ont comme points communs:

  1. de reconnaître la réalité à part entière du psychisme
  2. la recherche des processus psychologiques par l'étude génétique

[modifier] Naissance de la clinique

La psychologie clinique, telle qu'elle se pratique en France, est attachée aux noms de Daniel Lagache et Juliette Favez-Boutonnier, tous deux médecins psychanalystes et philosophes. Ce triple ancrage lui donne son caractère particulier, fait d'une tension entre un pôle « objectif » qui serait représenté par l'utilisation de tests, et un pôle « subjectif » représenté par la situation d'examen et/ou de traitement. Dans les deux cas, il s'agit d'une situation clinique, c'est-à-dire de la saisie singulière d'un individu « en situation » par un autre individu.

Ce trépied, on peut le détailler rapidement :

  • De la médecine, elle hérite une méthode - la clinique - et un objectif - diagnostiquer et guérir (D. Lagache). Mais là où le médecin palpait, auscultait, percutait et écoutait, le psychologue conduit des entretiens à visée diagnostique et/ou thérapeutique, et pratique des tests, le cas échéant.
  • De la philosophie, elle tire une conception de l'homme, principalement phénoménologique : chaque sujet est unique et aucun vécu n'est réductible à un autre.
  • De la psychanalyse, une conception du fonctionnement psychique en termes de forces et de conflits se déroulant en des lieux et pouvant se traduire en symptômes.

[modifier] L'objet de la clinique

Le terme clinique est hérité de la médecine : si le psychologue est dit clinicien, c'est autant parce qu'il sort de son laboratoire pour rencontrer l'autre dans des situations « naturelles » que parce qu'il rencontre des personnes présentant des troubles ou des difficultés psychiques. Est donc clinicien le psychologue qui rencontre des personnes en tant d'individus singuliers, contrairement à la situation de laboratoire où ce sont des variables qui sont manipulées.

"L'humanité de l'objet la spécifie moins que l'attitude méthodologique : envisager la conduite dans sa perspective propre, relever aussi fidèlement que possible les manières d'être et de réagir d'un être humain concret, complet, aux prises avec une situation, chercher à en établir le sens, la structure et la genèse, déceler les conflits qui la motivent et les démarches qui tendent à résoudre ces conflits, tel est en résumé le programme de la psychologie clinique"(D. Lagache)

Il y a eu, au cours de l'histoire de la discipline, un déplacement de son centre de gravité. La psychanalyse, qui était à ses frontières comme une « ultra-clinique » est petit à petit devenu son noyau dur, la confrontant au risque de n'être plus qu'une sorte de cytoplasme mou. [4] Les choses sont aujourd'hui plus diversifiées, et la psychanalyse est redevenue un modèle théorique, parmi d'autres, de la psychologie clinique. La psychanalyse avait été appelée à cette place du fait d'une série d'oppositions qui étaient vécues comme des impasses : des points de vue (naturaliste vs humaniste), des champs (psychologie expérimentale vs médecine), des pôles de la personnalité (le comportement vs la sphère affective). Cela a eu pour effet immédiat un enrichissement de la discipline, tant du point de vue de la technique (l'entretien, les tests) que du point de vue doctrinal.

L'unité de la psychologie qu'appelait de ses vœux Daniel Lagache ne peut donc être obtenue qu'en maintenant un équilibre entre des forces parfois opposées.

Ce que l'on appelle une personnalité, n'est-ce pas non plus un équilibre entre des forces internes et externes ? Ce que cette personnalité peut avoir d'unique, de singulier, d'irréductible à l'autre, sera exploré aussi complètement que possible à l'aide d'entretiens ou de tests. Il ne s'agit pas d'exclure la subjectivité, ni même de la réduire, mais de la mettre au cœur du projet de la psychologie clinique, d'en faire son objet d'étude : un sujet, le psychologue, tente de comprendre un autre sujet, le consultant, et il le fait avec les techniques et les méthodes de sa discipline, mais également avec ce qu'il est comme sujet. C'est là, au cœur de la subjectivité, de l'individuel, que la psychologie clinique rencontre l'universel, et partant, fonde sa scientificité.

D. Lagache définit l'objet de la clinique comme « l'étude de la conduite humaine individuelle et de ses conditions (hérédité, maturation, conditions psychologiques et pathologiques, histoire de la vie) en un mot l'étude de la personne totale en situation ". (D. Lagache) Elle utilise comme technique l'entretien et les tests.

L'individu pris dans sa concrétude, tel est l'objet de la psychologie clinique : « La psychologie clinique est caractérisée par l'investigation systématique et aussi complète que possible des cas individuels ». [5]

[modifier] Critiques et controverses

La psychologie clinique est un large domaine et il y a des tensions récurrentes pour déterminer jusqu'à quel degré la psychologie clinique devrait être basée sur des recherches empiriques et des pratiques basées sur des faits ou bien sur une pensée rationnelle et un jugement critique.

Les cliniciens peuvent accorder une importance variable à ce sujet, mais dans tout les cas les professionnels qualifiés peuvent s'enregistrer auprès de différents types d'organisations représentatives.

La psychologie clinique peut être sujette à des critiques similaires à celles faites à la psychiatrie, par exemple par le mouvement Antipsychiatrique.


En dépit d'une base de fait grandissante, il reste encore de nombreux questionnements quant à l'efficacité d'un certain nombre de formes d'évaluation et de traitement en usage dans la psychologie clinique.

[modifier] Citations

Freud a dit en janvier 1899 dans une lettre : « Les relations avec le conflit, avec la vie, voilà ce que j'aimerai appeler psychologie clinique. »

[modifier] Notes et références de l'article

  1. Serge Nicolas (2005), Introduction du livre de Pierre Janet, L'automatisme psychologique, 1889, p.5.
  2. Lydia Chabrier, Psychologie clinique, 2007, p.35;
  3. Plusieurs textes sur la question sur psychiatrie-française.com
  4. Mouvement dû à l'histoire de la psychanalyse en France, comme le montre bien Claude-M. Prévost dans La psychologie clinique, Que sais je.
  5. D. Lagache, L'unité de la psychologie, p. 70, Quadrige / P.U.F.

[modifier] Bibliographie

  • Lydia Chabrier, Psychologie clinique, Hachette sup, 2007.
  • André Rey (psychologue): L'examen clinique en psychologie, PUF, 1964 , coll. Le psychologue, ASIN: B0000DOT5F
  • Colette Chiland et coll. : L'entretien clinique, PUF, 2006, ISBN 2-13-055463-6
  • Colette Duflot: Le psychologue clinicien: l'invention d'une profession, 2008, Economica-Anthropos, ISBN 2717855564

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens et documents externes