Principauté de Sealand

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Principality of Sealand
(Principauté de Sealand)
Drapeau Armoiries
Drapeau Armoiries
Localisation
Administration
Statut politique Micronation
Déclarée indépendante depuis le 2 septembre 1967, non reconnue
Capitale 51°53′40″N 01°28′57″E / 51.89444, 1.4825
Gouvernement
- Chefs
Principauté
Roy Bates et Joan Bates
Géographie
Superficie 0,00055 km2
Démographie
Population  (2002) 5
Densité 1800 hab./km²
Langues Anglais
Économie
Monnaie Dollar de Sealand
Autres
Fuseau horaire UTC +0

La principauté de Sealand est un État auto-proclamé, installée sur une ancienne plate-forme militaire[1] appelée Fort Roughs[2], créée au large du Royaume-Uni par la Royal Navy lors de la Seconde Guerre mondiale, dans les eaux internationales de la mer du Nord.

Elle est considérée par ses partisans, principalement internautes, comme une micronation. Elle n’est reconnue par aucune des nations qui constituent les Nations unies[3]. Sa population n’excède que rarement cinq habitants et sa surface habitable est de 550 m2 environ[4].

Elle est située à 10 km des côtes de Suffolk, en Angleterre, à 51°53′40″N 1°28′57″E / 51.89444, 1.4825, et est occupée depuis 1967 par les membres de la famille de Paddy Roy Bates et ses associés.

Sommaire

[modifier] Préambule

La principauté de Sealand est une ancienne plate-forme militaire au large du Royaume-Uni dont un ancien officier britannique du nom de Roy Bates s’est emparé et qu’il a déclarée unilatéralement État indépendant en 1975. Cette indépendance n’est reconnue par aucun autre État mais repose sur un vide juridique qui permet d’y abriter expressément des activités par ailleurs illégales sur le territoire britannique (radios libres dans les années 1960, casinos en ligne). Souverain auto-proclamé, Bates, né en 1922, a abdiqué en faveur de son fils Michael en 2000. Toutefois, il apparaît clairement aux yeux du droit international public que la dite Principauté de Sealand ne dispose pas de « territoire » (au sens de terre). Or, le territoire est l’un des quatre éléments (avec la population, le gouvernement effectif et indépendant — souverain) nécessaires pour être reconnu en tant qu’État par les autres États membres de la communauté internationale. En conclusion, la Principauté de Sealand n’est pas un État reconnu (sinon une reconnaissance tacite par la poste française à l’époque où Georges Pompidou était président de la République française).

[modifier] Histoire

En 1966, Roy Bates, ancien major de l’armée britannique et vétéran de la Seconde Guerre mondiale, entend parler de cette plate-forme située dans les eaux internationales. Après avoir consulté avocats et spécialistes du droit maritime, il découvre que rien, apparemment, ne s’oppose à la prise de possession de la plate-forme. Le 25 décembre 1966, à bord de son bateau de pêche et en compagnie de quelques amis, Bates aborde la plate-forme et en prend possession. Un tribunal de l’Essex leur donne par la suite raison contre le gouvernement britannique.

En août 1978, des "pirates" néerlandais (ainsi qu’un Allemand) kidnappent le Prince Michael, fils de Roy Bates, et occupent le Sealand. Bates et ses associés reprennent le contrôle par la force, mais sans effusion de sang. L’Allemand est détenu un temps pour "trahison" (étant détenteur d’un passeport sealandais), puis relâché. Cet événement est officiellement considéré comme une "guerre" par le gouvernement sealandais[5].

En juin 2006, le Sealand est ravagé par un incendie, et selon la presse, en janvier 2007, les autorités annoncent qu’elles quittent le "pays" ; et que le "gouvernement" chercherait à louer le Sealand à de nouveaux habitants[6],[7].

En janvier 2007, la presse se fait l’écho de la mise en vente de la plate-forme. Dix millions de livres pour 550 m2 habitables, soit un prix de 27 000 euros par m². Le journal français Libération rapporte ces propos du prince en titre, Michael, fils de Roy Bates : « On possède l’île depuis 40 ans, mais maintenant, mon père est âgé de 85 ans, peut-être que le temps est venu d’un rajeunissement ». Et d’insister sur les avantages de l’État : vue panoramique sur la mer, tranquillité totale, absence d’impôt… Aucune précision n’est toutefois apportée sur les changements que cette vente va impliquer sur le régime. Le prince va-t-il laisser sa place au nouveau propriétaire, ou bien règnera-t-il sur les nouveaux citoyens, lesquels détiendront tout le territoire de l’État ?

Quelques jours plus tard The Pirate Bay (qui a déjà soutenu la micronation Ladonia) lance l’initiative BuySealand.com afin de récolter 2 000 000 USD pour acheter la plate-forme. Depuis, et malgré le succès de la collecte de fonds, l'équipe de The Pirate Bay a abandonné cette idée devant le refus du prince régent.

[modifier] Politique

Délégation sealandaise au sommet des micronations de Helsinki.
Délégation sealandaise au sommet des micronations de Helsinki.

Sealand possède une constitution simple, instituée en 1995, et qui se compose d’un préambule et de sept articles. Le préambule affirme l’indépendance de Sealand, alors que les articles traitent différemment du statut du Sealand comme monarchie constitutionnelle, le pouvoir des bureaux gouvernementaux, le rôle d’un sénat désigné et consultatif, les fonctions d’un tribunal légal désigné et consultatif, l’interdiction de porter des armes, exceptée par les membres de la « garde de Sealand », le droit exclusif du souverain de s’occuper de la politique étrangère et de changer la constitution, et la succession héréditaire de la monarchie.

Les bureaux gouvernementaux actuels de Sealand sont : le bureau des Affaires extérieures, le bureau des affaires internes, et le bureau de la Poste, des Télécommunications et de la Technologie.

La plupart des organes du gouvernement de Sealand sont apparemment inactifs, ou bien opèrent en dehors du territoire de Sealand.

[modifier] Géographie

carte de Sealand.
carte de Sealand.

Le territoire de la principauté de Sealand est le Fort Roughs, une des plates-formes de l’armée britannique, construite au large de l’estuaire de la Tamise. Le fort assurait la protection contre les raids aériens allemands pendant la Seconde Guerre mondiale. Il avait été désarmé et laissé à l’abandon après le conflit.

La particularité de Fort Roughs par rapport aux autres plates-formes de l’estuaire de la Tamise posées pendant la guerre est d’être situé dans les eaux internationales.

[modifier] Économie

[modifier] Monnaie officielle

La monnaie officielle de Sealand est le « dollar de Sealand », qui vaut exactement un dollar des États-Unis d’Amérique (USD). Plusieurs pièces de monnaie différentes sont sorties depuis 1972 dans diverses unités de cette devise. À cause de la population limitée de Sealand, son inaccessibilité physique et le manque d’une économie à grande échelle, il est peu probable que ces pièces de monnaie aient été conçues pour un véritable usage en tant que devise. La plupart ont été conçues dans des métaux précieux, afin d’intéresser les investisseurs et les collectionneurs de pièces de monnaie. Au début des années 1990, le gouvernement « exilé » a également produit une pièce de monnaie à l’effigie du « premier ministre » Seiger.

[modifier] Économie extérieure

La base pouvant accueillir une garnison de 160 à 200 personnes et se trouvant sur le plateau continental, Sealand commence à intéresser des hommes d’affaires. Roy Bates reçoit des projets d’ouverture de casinos, d’hôtels, et même de services de renseignements de pays communistes d’Europe de l’Est pendant la Guerre froide. Mais, jusqu’à présent, un seul de ces projets a été réalisé. En juin 2000, le prince héritier Michael Bates, fils du couple et marin-pêcheur, a signé un accord avec la société américaine HavenCo Ltd pour développer à Sealand un paradis internet offshore, la principauté abritant contre finances des serveurs informatiques.

[modifier] Démographie

Sa population officielle est d’un habitant en 2002. Elle a rarement excédé les cinq habitants depuis sa prise de possession par Roy Bates en 1966. Étant donné l’étroitesse de la plate-forme, et son incapacité à s’agrandir, la démographie de Sealand ne pourra a priori jamais croître.

Plateforme de Roughs.
Plateforme de Roughs.

[modifier] Culture

Le couple entame, peu après son installation sur la plate-forme, la création de symboles de souveraineté : un drapeau, une monnaie à l’effigie de la princesse, des timbres-poste, des passeports. Le drapeau, dessiné par Joan Bates, est blanc, rouge (pour son mari) et noir (pour rappeler la piraterie), et porte des queues de sirène et un lion. Il paraîtrait qu’une série de peintures de l’artiste Mengal fait partie des collections de cette principauté.

Sealand a son équipe de football.

[modifier] Timbres

Sealand a édité pour la première fois des timbres en 1969, quand un service d’hélicoptère a été institué pour porter le courrier entre la tour de Roughs et Bruxelles, en Belgique (cf. Timbre privé). Pendant plusieurs mois à partir de septembre 1969, un volume significatif de courrier portant l’estampille de la « poste sealandaise » (environ 25 000 en 1969, et postés en Belgique) aurait été accepté sans taxation par la poste belge pour une destination internationale.

[modifier] Controverses juridiques

Le statut particulier de Sealand a donné lieu à de nombreux démêlés juridiques.

En novembre 1999, la guardia civil madrilène arrête un petit trafiquant d’essence et est étonnée de découvrir que l’homme possède un passeport diplomatique de Sealand, et qu’il entretient une ambassade sur l’avenue de la Castellana à Madrid. Cet ancien garde civil renvoyé pour détournement de fonds de la guardia civil, est également connu comme le notaire Frant Blake en Allemagne d’où il vend sur internet de faux passeports, diplômes ou certificats de domiciliation d’entreprises. Après un an d’enquêtes, soixante « citoyens » de Sealand sont arrêtés et accusés de trafic de drogue, escroquerie, détention d’explosifs, vente de 4 000 faux passeports à Hong Kong, de permis de conduire à des trafiquants de drogue au Maroc, trafics d’armes, etc.

Le 14 juin 2000, dans le journal Le Monde, le prince, la princesse et le prince héritier (qui gère effectivement Sealand depuis la plate-forme) ont affirmé qu’ils n’étaient pas liés à ces faits, et que le nom de Sealand a été utilisé sans leur autorisation ; le prince certifie que son « pays » n’a jamais ouvert d’ambassade, ni fourni de passeports à quiconque en dehors des réels habitants de Fort Roughs.

[modifier] Statut juridique

Le gouvernement sealandais affirme que la souveraineté de la Principauté s’appuie sur les principes suivants :

  1. Lorsque Paddy Roy Bates et ses associés occupèrent Fort Roughs en 1967, celui-ci se trouvait dans les eaux internationales, en dehors de la juridiction britannique et de toute autre juridiction nationale. Le fort était donc terra nullius, et pouvait être occupé par un nouvel État. Le Sealand serait donc un État souverain légitime de jure.
  2. Une décision de la justice britannique en 1968, qui reconnut que Fort Roughs se trouvait dans les eaux internationales, et donc en dehors de la juridiction de la cour. Ce qui serait une reconnaissance de facto de la souveraineté du Sealand[8].

Dans le droit international, les opinions sont divisées. Le fondement légal de l’existence d’un État dépend-elle de la reconnaissance de cet État par d’autres États, ou bien de l’acquisition de caractéristiques étatiques dont l’existence peut être constatée par d’autres États ?

Et, dans le premier cas, cela nécessite-t-il une « reconnaissance diplomatique », ou bien uniquement la reconnaissance de l’existence de l’État ? Il est en tout cas certain qu’aucun État n’a officiellement reconnu le Sealand. Toutefois, Bates affirme que les négociations menées par l’Allemagne pour la libération d’un prisonnier détenu par Bates constitue une reconnaissance de facto de l’existence du Sealand, et donc de sa souveraineté.

Selon les critères adoptés par la Convention de Montevideo (1933), un État a besoin :

  • d’un territoire défini ;
  • d’une population permanente ;
  • d’un gouvernement ;
  • de la capacité d’établir des relations avec d’autres États souverains.

Des critères similaires ont été acceptés par la Commission d’arbitrage Badinter de la Communauté européenne, dont la fonction fut de déterminer les effets juridiques de la partition de l’ex-Yougoslavie. La Commission définit un État comme une entité ayant « un territoire, une population et une autorité politique », critères qui ne dépendent pas de la reconnaissance d’un État par un autre.

Néanmoins, malgré les affirmations du Sealand, une cour allemande décida en 1978 que celui-ci n’était pas un État souverain, estimant que ces critères (« un territoire, une population et une autorité politique ») n’avaient pas été remplis[9].

Ainsi, la cour déclara que Fort Roughs, île artificielle, n’était pas « un segment naturel de la surface de la Terre », et ne pouvait donc constituer le « territoire » d’un État. En outre, la cour affirma que les citoyens du Sealand ne partageaient pas un tissu de liens communautaires suffisant pour constituer un « peuple » en droit international.

Plus précisément, du point de vue de la justice allemande,

[…] dans le cas du « Duché du Sealand » [sic] nous ne pouvons accepter qu’il existe un « peuple » dans le sens du droit international, puisqu’il n’y a pas entre ces personnes de vie communautaire. […] [Le devoir d’un État] n’est pas seulement de promouvoir une association au sens large, dont le but serait le partage de passe-temps et d’intérêts communs. Un État doit plutôt viser le maintien d’une forme essentiellement permanente de vie communautaire, c’est-à-dire le partage d’une destinée commune.
[…] Ces « habitants » n’ont pas acquis leur « nationalité » dans le but de vivre ensemble et de mener les divers aspects de leur vie en commun ; au contraire, ils continuent à poursuivre leurs intérêts individuels en dehors du « Duché ». L’aspect partagé de leur association se limite à une petite partie de leur vie – c’est-à-dire les questions de commerce et d’impôts. Ce degré d’intérêts communs ne peut pas être considéré suffisant pour que soit reconnu là un « peuple » au sens entendu par le droit international.
In Re Duchy of Sealand (1978) 80 ILR 683, at 687-9 (Cour Administrative de Cologne)

En 1987, le Royaume-Uni décida l’extension de ses eaux territoriales à 22 km, ce qui est autorisé par la législation internationale depuis 1958. Fort Roughs se trouva ainsi à l’intérieur des eaux territoriales britanniques. Le Sealand prétend avoir étendu ses propres eaux territoriales à 22 km un jour avant la décision britannique, mais les doctrines juridiques du Royaume-Uni font que la plate-forme est considérée comme faisant partie du comté anglais de l’Essex.

D’après la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (1982), il n’est pas possible de consentir à l’existence d’une île artificielle à moins qu’elle n’ait été approuvée ou construite antérieurement par un État voisin. Ce qui veut dire qu’il n’est plus possible de bâtir une île artificielle et d’en faire un État souverain, ni d’en faire une extension d’un État, dans le but d’étendre ses eaux territoriales ou sa zone économique exclusive.

Un tel État ne peut être reconnu comme souverain, à moins de prouver qu’il était de facto souverain avant 1982.

La politique du gouvernement britannique semble être de ne pas faire de commentaire à ce sujet, et de ne pas agir à moins d’y être contraint. Des documents, rendus disponibles au public par une loi qui met fin à leur confidentialité après 30 ans, révèlent que le Royaume-Uni avait songé à prendre le Sealand de force, mais que cette idée fut rejetée par le Premier Ministre à cause du risque de pertes en vies humaines, ainsi que le risque d’un désastre juridique et médiatique.

En 1990, une cour administrative des États-Unis décida que le Sealand n’était pas une nation souveraine, et ne l’a jamais été, sur la base d’informations provenant du ministère du commerce et de l’industrie. En 1991, cette décision fut confirmée par une cour fédérale.

Le 6 décembre 2005, le journal britannique The Times prétendit que le gouvernement et la justice britanniques avaient enfin reconnu que le Sealand « se trouve en dehors du territoire national britannique […] et qu’il ne fait pas partie du Royaume-Uni ». Toutefois, le journal ne fournit pas de précisions plus détaillées, et aucune autre source ne semble confirmer cette information[10].

[modifier] Annexes

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens externes

commons:Accueil

Wikimedia Commons propose des documents multimédia libres sur Sealand.

http://principality-of-sealand.eu/welcome_e.html

[modifier] Références

  1. Sealand : Paradis fiscal, simple île d'escroc ou paradis des démocrates ?
  2. La solution pour légaliser le P2P : achetez une île ! - Ratiatum
  3. Vous voulez être peinard et libre, achetez une île ! - Quel développement pour les services à la personne
  4. P2P : The Pirate Bay veut son indépendance par Neteco.com
  5. The Principality of Sealand
  6. World's tiniest country seeks new owners to fly the flag - Britain - Times Online
  7. Report: Sealand is for sale (or "transfer") - Boing Boing
  8. (en)Official History of Sealand, Principality of Sealand. Consulté le 12 janvier 2007
  9. (en)In Re Duchy of Sealand (Adminstrative Court of Cologne), International Law Reports. Consulté le 12 janvier 2007
  10. (en)Country’s passports are for sale, 6 décembre 2005, Times Online. Consulté le 16 juillet 2006