Otton Ier du Saint-Empire

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Pour les articles homonymes, voir Othon Ier.
Otton Ier le Grand
Otton Ier de Saxe
Sceau impérial d'Otton Ier (968)
Dynastie Ottoniens
Naissance 23 novembre 912
Wallhausen
Décès 7  mai   973
Pays Germanie
Titre roi de la Francie Orientale (Germanie)
(936 - 973)
Grade militaire
Arme
Service de {{{débutdecarriere}}} à {{{findecarriere}}}
Couronnement 2 février 962, à Rome
Sacre 996
Investiture
Prédécesseur Henri l'Oiseleur
Successeur Otton II du Saint-Empire
Conflits
Commandement
Faits d'armes
Distinctions
Hommage
Autres fonctions Roi des Romains
Enfant de Henri Ier de Germanie
et de
Mathilde de Ringelheim
Conjoint
Enfants Otton II du Saint-Empire
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Otton Ier, surnommé Otton le Grand, est né le (23 novembre 912 à Wallhausen et mort le 7 mai 973). Fils d'Henri Ier de Germanie et de Mathilde de Ringelheim, il règne de 936 à 973.

Durant son long règne, il donne à la royauté germanique un éclatant prestige, tant par son sens politique que par ses victoires militaires. Il parvient à restaurer la dignité impériale et devient empereur des Romains de 962 à 973. Il est ainsi le fondateur du Saint Empire romain germanique même si cette dénomination n'apparaît qu'au XVe siècle[1].

Sommaire

[modifier] Le monde germanique et l'Europe occidentale à l'époque d'Otton Ier

L’empire franc, divisé en trois lors du partage de Verdun de 843 s’est effondré définitivement en 887. Cette année là, l'empereur Charles le Gros est destitué lors de la diète de Tribur et le système électif est établi. Les Carolingiens perdent le trône de Francie orientale après la mort de Louis IV de Germanie en 911. Quant au titre impérial, il n'est plus attribué à partir de 924[2]. Comme les Vikings l'on fait depuis plus d'un siècle à l'ouest, les Magyars, ancêtres des Hongrois, déferlent sur l’est de l’Europe à partir de 900. Le délitement du pouvoir impérial a entraîné celui de l’Église franque qui vit sous l’emprise des laïcs. Dans les différents royaumes d’Occident, les rois et les princes nomment les évêques. Mais pour eux, un bon évêque est un laïc qui possède une fortune, qui a du sang noble, et dont l’esprit est celui d’un vassal. La simonie se développe, et il est fréquent que les évêques et les prêtres aient femmes et enfants, malgré l’interdiction qui leur est faite de se marier après l’ordination. La papauté est aux mains des grandes familles aristocratiques romaines. Son pouvoir politique est devenu inexistant sous les coups des invasions. Des papes médiocres et immoraux succèdent durant une grande partie du Xe siècle. En 954, Jean XII devient pape à l'âge de 18 ans. Il ne pense qu’à faire la cour aux femmes, à festoyer et à participer aux parties de chasse[3].

[modifier] La Francie Orientale au Xe siècle

Au Xe siècle, la Francie orientale est limitée à l'Ouest par le Rhin, au Nord par le Jutland et la mer Baltique, à l'Est par l'Elbe, la Saale et la Bohême, au Sud par le Danube et le Alpes[4]. La population y est inégalement répartie. Elle se concentre dans les vallées du Rhin et du Danube à l'Ouest et dans celles de l'Elbe et de la Saale à l'Est. La plupart des massifs sont vides d'hommes. Les forêts sont très étendues et très épaisses[5]. À partir du Xe siècle, le nombre des hommes commencent à augmenter et à grignoter les forêts. L'exploitation de massifs argentifères dans le massif du Harz en Saxe permet cette région de commencer à se densifier[6].
La Francie orientale est parcourue par des routes commerciales entre l'Occident et l'Est européen vouées principalement au commerce des esclaves, qui croisent l'axe Nord-Sud de les vallées du Rhin, de la Meuse et du Danube. Des riches villes bordent la vallée du Rhin comme Mayence ou Ratisbonne[7].
Au Xe siècle, la Francie orientale est divisée en quatre grandes entités : La Saxe, la Souabe, la Bavière et la Franconie qui constituent des duchés ethniques. Les familles nobles à leur tête, possèdent d'immenses domaines. La famille qui dirige la Saxe est celle des Luidolfinger. À la mort du dernier roi carolingien de Francie orientale, cette famille est une des plus puissance du pays.

[modifier] La naissance et l'affirmation d'une nouvelle dynastie germanique, la maison de Saxe

Henri l'Oiseleur, duc de Saxe depuis 912 est couronné roi de (Germanie) en 919. Il refuse le sacre pour ne pas donner l'impression que la royauté fait de lui un être à part[8]. Henri l'Oiseleur acquiert un prestige considérable grâce à ses victoires remportées sur les Slaves, les Danois et les Magyars[9]. Il intègre la Basse-Lotharingie à la Francie orientale. Cette partie nord de la Lotharingie va jusqu'aux bouches de l'Escaut et comprend Aix la Chapelle, la capitale impériale[10]. Il reçoit l'hommage de Wenceslas, le duc de Bohême. Il assure son pouvoir en nommant les évêques et les abbés de Lotharingie et de Souabe. Avant sa mort, il obtient la promesse des princes germaniques que son fils Otton (ou Othon) sera choisi comme son successeur[1]. Après sa mort survenue le 2 juillet 936, la diète d'Erfurt entérine ce choix et désigne Otton comme successeur. La dynastie saxonne repose dès lors sur le double principe héréditaire et électif. Ceci va permettre à Otton Ier de faire élire son fils Otton II à l'âge de 6 ans et de le faire couronner en 961 à Aix la Chapelle.

Otton Ier, âgé de vingt-quatre ans, est couronné le 7 août 936 à Aix-la-Chapelle, montrant ainsi qu'il veut renouer avec la tradition carolingienne. Les représentants de toutes les communautés de la Francie orientale sont convoqués mais ce sont ceux de la Saxe et de la Franconie qui ont le privilège de lui rendre hommage en premier le 7 août dans l'atrium de la chapelle palatine. Il est ensuite acclamé par le peuple et sacré dans la chapelle par l'archevêque de Mayence. Il reçoit ensuite les insignes de son pouvoir : épée, manteau, bracelet, sceptre et bâton de commandement. Au cours du banquet qui suit, les grands remplissent des offices domestiques[11]. Otton entend montrer son pouvoir supérieur. Il bannit Eberhard, le duc de Bavière après l'avoir battu car celui-ci avait refusé de lui rendre hommage[12].

En 938, le jeune roi doit faire face à une rébellion menée par son frère Henri Ier de Bavière soutenu par le duc Gislebert de Lotharingie, le duc de Franconie Éberhard, une partie de la noblesse saxonne, ainsi que l'alliance du roi carolingien de Francie occidentale, Louis IV d'Outremer qui entend bien s'approprier l'ancienne capitale impériale, Aix. Grâce à l'appui du duc Hermann Ier de Souabe, Otton parvient à défaire les révoltés lors de la bataille d'Andernacht en 939 où les ducs de Lotharingie et de Franconie sont tués. Il pardonne à son frère et le place même à la tête de la Lotharingie mais celui-ci continue à comploter. Il ne se soumet vraiment qu'en 941[13]. Pour assurer son pouvoir sur les duchés, Otton multiplie les alliances matrimoniales. Son fils ainé épouse ainsi l'héritière du duché de Souabe dont il devient duc après la mort de son beau-père.

[modifier] La renaissance d'un empire dans le monde Occidental

La Lotharingie, point faible du royaume ottonien est indispensable au prestige royal à cause d'Aix-la-Chapelle. Otton joue de la rivalité entre les derniers Carolingiens et les Robertiens, les ancêtres des Capétiens, pour assurer son emprise sur la règion. Il s'efforce de maintenir un équilibre entre les deux maisons afin qu'aucune ne soit assez forte pour revendiquer la Lotharingie[14]. En 953, Brunon, un autre frère d'Otton, est promu à la fois archevêque de Cologne et duc de Lotharingie[15].

En mars 953, une nouvelle révolte éclate au cœur du royaume. Cette fois-ci elle est menée par son fils ainé Liudolf, duc de Souabe et son gendre Conrad le Roux. Le premier craint d'être évincé de la succession au profit du fils qu'Otton attend de sa seconde épouse Adélaïde. Le second trouve qu'il ne participe pas assez aux décisions du royaume. Beaucoup d'évêques et de nobles se joignent à la rébellion. Le roi ne peut plus compter que sur la Saxe et la Lotharingie grâce à Brunon. Mais les rebelles commettent l'erreur de s'allier aux Slaves et aux Hongrois, ce qui leur vaut de perdre une grande partie de leurs soutiens.

[modifier] L'expansion germanique à l'époque d'Otton Ier

Otton le Grand recevant la soumission de Bérenger d'Ivrée
Otton le Grand recevant la soumission de Bérenger d'Ivrée

Avant même d'avoir fini de consolider ses positions en Lotharingie, Otton part à la conquête de l'Italie. En Italie, la situation est très confuse. L'anarchie qui y règne attise donc les appétits de ses puissants voisins. En 950, Bérenger d'Ivrée domine l'Italie à la mort de Lothaire d'Arles. Il emprisonne la veuve de Lothaire, Adélaïde de Bourgogne pour l'empêcher de se remarier et de mettre au monde un héritier possible au royaume d'Italie.

En 951, Otton descend en Italie avec une armée. À Pavie, il prend le titre de roi des Francs et des Lombards. Quelques semaines plus tard, il épouse Adélaïde en secondes noces. Après que le pape eut refusé de le recevoir, Otton quitte l'Italie en abandonnant son titre de roi des Francs et des Lombards, et en laissant son gendre Conrad le Roux sur place[16]. Bérenger peut prendre le titre royal contre un engagement de vassalité. Bérenger, demeuré seul, oublie son serment et s'attaque au pape Jean XII qui appelle Otton[17]. En Italie du sud, il envahit la Calabre puis fait la paix avec l'empereur byzantin Jean Ier Tzimiskès en 971.

Depuis le début du Xe siècle les Hongrois ou Magyars causent des ravages importants. Mais au milieu du siècle, ces ravages commencent à décroître car la résistance est mieux organisée. De plus, les envahisseurs parviennent à se sédentariser dans les plaines de Pannonie. En 955, Otton Ier défait les Hongrois à la bataille du Lechfeld près d'Augsbourg. Les Hongrois renoncent aux pillages, se sédentarisent dans la plaine de Pannonie et se christianisent. Ses soldats l'acclament alors comme le sauveur de la chrétienté, un vainqueur digne d'être empereur[18]. À la suite de cette victoires face aux Hongrois, Otton Ier rétablit les marches de Ostmark, la future Autriche, au sud de la Germanie dont les Babenberg vont devenir les marquis jusqu'au XIIIe siècle[19]. Il reconstitue aussi la marche de Carinthie, et apparaît ainsi comme le défenseur de la chrétienté[20]. La même année, il bat les Slaves Obodrites en Mecklembourg[21].

Ces victoires lui permettent aussi de jouer un rôle majeur sur le plan européen. Il obtient l'allégeance des rois de Bourgogne. Face aux Slaves, il conduit une véritable politique d'expansion vers l'est. Il établit des marches à l'est de l'Elbe : marche des Billung autour de l'évêché d'Oldenbourg, Nordmark (ancien nom du Brandebourg) et trois petites marches chez les Sorbes[1]. En 968, il fonde l'archevêché de Magdebourg avec des évêques suffrageants à Meissen, Mersebourg, et Zeitz dans le but de convertir les peuples slaves de l'Elbe. Mieszko Ier, premier souverain historique de la Pologne, lui rend hommage en 966[22]. En Germanie, il rend la Bohême tributaire et vainc les ducs de Franconie et de Lotharingie.

Soucieux d'établir des relations avec les grands puissances européennes, Otton Ier envoie un ambassadeur à Cordoue dans l'Espagne arabo-musulmane. Celui-ci en revient avec Recemund (Rabi ibn Sid al-Usquf ou Rabi ibn Zaid), représentant du calife Abd al-Rahman III, et évêque mozarabe d'Elvira. Sept ou huit ambassades se succèdent jusqu'en 976.

En 968, Otton Ier envoie Liutprand de Crémone en ambassade à Constantinople dans le but de demander à l'empereur Nicéphore II Phocas la main d'une princesse royale pour son fils[23]. Par ce mariage, Otton Ier espère obtenir la reconnaissance par l'empereur byzantin du titre d'« Empereur et Auguste » que le pape lui a conféré. Mais à la cour byzantine, Otton est simplement appelé « Rex ». Le nouvel empire, trop septentrional, ne peut incarner le renouveau romain.

[modifier] La restauration impériale

Othon Ier et le pape Jean XII, miniature de 1450
Othon Ier et le pape Jean XII, miniature de 1450

Reconnaissant d'avoir été protégé des projets expansionnistes de Bérenger II, le pape fait d'Otton le successeur de l'empereur Charlemagne, qui, en son temps, avait protégé la papauté contre les Lombards. À ce moment, il ne s'agit pas de la fondation d'une nouvel empire mais de la restauration de l'empire carolingien[1].

Le 2 février 962, à Rome, Otton est couronné empereur des Romains par le pape Jean XII. La couronne, de forme octogonale symbolisant les deux cités saintes de Rome et de Jérusalem, est le symbole le plus significatif de cette monarchie sacrale.

Le 13 février 962, il promulgue le Privilegium Ottonianum qui accorde au souverain pontife les mêmes privilèges que ceux que les Carolingiens avaient reconnus à la papauté, à savoir les donations faites par Pépin le Bref et Charlemagne. Le Privilegium Ottonianum, reprenant un diplôme de Lothaire Ier, oblige tout nouveau pape à prêter serment auprès de l'empereur ou de son envoyé avant de recevoir la consécration pontificale. Tout en donnant des privilèges au Saint-Siège, le Privilegium Ottonianum place la papauté sous tutelle impériale.

La mainmise d'Otton gêne cependant Jean XII qui noue des contacts avec Aubert, fils de Bérenger II, ainsi qu'avec Byzance. Il va même jusqu'à reprendre la tradition, abandonnée depuis Adrien Ier (772–795), de dater ses actes à partir des années de règne des empereurs byzantins. Otton revient à Rome et Jean doit s'enfuir. L'empereur convoque un synode qui juge le pape coupable d'apostasie, d'homicide, de parjure et d'inceste. Il le fait déposer le 4 décembre 963. Jean XII est remplacé par un laïc, qui prend le nom de Léon VIII. Otton Ier exige ensuite des Romains un serment. Ils jurent « qu'ils n'éliraient ni n'ordonneraient aucun pape en dehors du consentement du seigneur Otton ou de son fils. »[24] L’empereur contrôle alors totalement l'élection du pape, et pouvoir compter sur la collaboration du pontife garantit l'autorité impériale sur les Églises locales du Saint-Empire. Comme Charlemagne, Otton reçoit de Rome la mission de défendre l'ordre et la paix de la chrétienté.

[modifier] L'organisation de l'empire

[modifier] Un pouvoir limité

L’empire ottonien.
L’empire ottonien.

L'autorité d'Otton Ier s'étend sur d'immenses territoires qui vont de la Meuse à l'Elbe et de la mer du Nord à la Méditerranée. Cependant, des forces intérieures y sont très actives. Les Germains sont divisés en duchés correspondant aux différentes ethnies de ce peuple en Saxe, en Franconie, en Souabe et en Bavière[25]. Le nouvel empire intègre aussi des Latins et des Slaves. Otton Ier ne peut plus compter sur l'administration carolingienne ; les comtes et missi dominici ont disparu. Les ressources financières royales sont réduites aux revenus du domaine propre du souverain et à l'exploitation de son droit de gîte. Pour asseoir son autorité sur les grands, Otton parvient à faire du duc un vassal sous l'entière autorité du roi[1].

[modifier] L'Église, clef de voûte de l'administration ottonienne

Sous les Carolingiens, la mise en place progressive de l'hérédité des charges avait fortement contribué à l'affaiblissement de leur autorité. Pour éviter une pareille dérive, Otton s'appuie sur l'Église germanique qu'il comble de bienfaits mais qu'il assujettit.

Les évêques et les abbés constituent l'armature de l'administration ottonienne. L'empereur s'assure la nomination de tous les membres du haut clergé de l'empire. Une fois désignés, ils reçoivent du souverain l'investiture symbolisée par les insignes de leur fonction, la crosse et l'anneau. En plus de leur leur mission spirituelle, ils doivent remplir des tâches temporelles que leur délèguent l'empereur. Ainsi l'autorité impériale était-elle relayée par des hommes compétents et dévoués[25]. Cette Église d'empire ou Reichskirche, assure la solidité d'un État pauvre en ressource propre. Elle permet de contrebalancer le pouvoir des grands féodaux (ducs de Bavière, Souabe, Franconie, Lotharingie). L'évêché d'Utrecht constitue, jusqu'aux environs de 1100, l'entité la plus puissante des Pays-Bas du Nord, Liège et Cambrai celles des Pays-Bas du Sud[26]. Le pouvoir impérial choisit ses hauts dignitaires de préférence dans sa parentèle, proche ou élargie. Celle-ci bénéficie des plus hautes charges épiscopales ou monastiques. Le meilleur exemple en est le frère propre d'Otton, Brunon, évêque de Cologne, qui adopte la règle de l'abbaye de Gorze pour les monastères de son diocèse[27]. On peut citer aussi Thierry Ier, cousin germain d'Otton, évêque de Metz de 965 à 984 ; un parent proche d'Otton, le margrave de Saxe Gero, qui fonde l'abbaye de Gernrode vers 960-961, en Saxe ; Gerberge, nièce de l'empereur, abbesse de Notre-Dame de Gandersheim.

[modifier] L'empire: puissance économique

Avoir une clientèle suffisamment puissante pour contrôler l'empire nécessite de grandes ressources financières. Avec la généralisation du denier d'argent par les carolingiens une révolution économique est en cours: les surplus agricoles deviennent commercialisables et on assiste dans tout l'occident à la multiplication de la productivité et des échanges[28]. En réunissant Italie et Germanie dans un même empire, Otton Ier contrôle les principales voies de commerce entre Europe du Nord et la méditerranéens. Le trafic commercial avec Byzance et l'orient transite en effet de la méditerranée vers l'Italie du sud et surtout le bassin du Po et rejoignait celui du Rhin via les voies romaines traversant les cols alpins. Cette voie est à l'époque plus utilisée que la traditionnelle voie rhodanienne tant que l'Adriatique est plus sur que la méditerranée occidentale où sévissent les pirates sarrasins. Otton sait garder la main mise sur les péages prélevés sur ce trafic et développer les marchés nécessaires à l'augmentation de ce trafic. Ainsi contrairement à ce qui se passe en Francie, Otton garde le monopole de la frappe monétaire et fait ouvrir des mines d'argent près de Goslar[29]. Or, la création d'un atelier monétaire dans une ville ou une abbaye entraine la création d'un marché ou peut être prélevé le tonlieu[29]. Cette puissance commerciale lui permet d'acheter un clientèle qui est la base de son pouvoir, mais aussi d'étendre son influence à la périphérie de l'empire: les marchands italiens ou anglais ont besoin de son soutien, les slaves adoptent le denier d'argent...[30]

[modifier] Les margraves

Les margraves (marquis) dirigent les marches. Ils disposent des châteaux et du commandement militaire de leur marche. Ils peuvent au nom de l'empereur donner des biens à l'Église. Ils perçoivent, pour le roi dans un premier temps, puis dans un second temps pour leur propre compte, le Wozot, une redevance en grain due par les paysans. Ils perçoivent aussi les tonlieux, redevance sur les marchés et sur la circulation des marchandises. Pour développer les marches, il est fait appel à des allemands venus de l'ouest de l'Empire, principalement des paysans des Pays-Bas, de la Franconie et de Thuringe attirés par des parcelles plus grandes et des droits féodaux plus légers. Les premiers bourgs apparaissent[1].

[modifier] La renaissance ottonienne

La renaissance ottonienne emprunte à l'Antiquité romaine ses formes et ses principes mais pour les fondre dans un modèle germanique[31].

[modifier] Le renouveau religieux

Les clercs célèbrent en Otton un nouveau Charlemagne[1]. La vie religieuse connait un nouvel essor.

L'époque ottonienne se caractérise par une période de réforme des monastères dans une grande partie de l'Occident chrétien[27]. Otton Ier fonde l'abbaye de Saint-Maurice de Magdebourg en 937. Pendant toute sa vie, il a des liens très privilégiés avec les hauts dignitaires de l'Église, travaillant aussi avec eux aux réformes monastiques de son temps. Il n'en est certes pas l'initiateur, mais un acteur dynamique.

La réforme clunisienne, qui commence vers 960-965, peut compter sur l'aide de la seconde épouse d'Othon, l'impératrice Adélaïde, sœur du roi Conrad III de Bourgogne.

Un autre important mouvement de réforme monastique se développe dans le duché de Lorraine, autour de l'abbaye de Gorze. Dans les régions reconquises sont fondées des abbayes prestigieuses comme celles de Melk, et de sankt Florian en Autriche[32]

Le renouveau religieux se manifeste aussi par la construction d'églises ou de cathédrales comme celle de Magdebourg. En 937, une première église avait été fondée et consacrée à saint Maurice. Les travaux, financés par Otton Ier, respectent la mode romaine. Ce premier édifice, grandiose et équilibré, avait probablement une nef à quatre bas-côtés, une largeur de 41 mètres, une longueur de 80 mètres, et une hauteur estimée à environ 60 mètres. Cette église a été agrandie en 955 lorsqu'elle obtint le statut de cathédrale. Elle fut, à l'époque, décorée par des plaques d'orfèvrerie exécutées à Milan et racontant des scènes du Nouveau Testament[33]. Détruite en 1207 par un incendie, elle fut ensuite reconstruite.

[modifier] Les débuts de l'art ottonien

L'art ottonien recouvre une période allant du milieu de Xe siècle à la fin du XIe siècle à l'intérieur de l'empire germanique. C'est donc sous le règne d'Otton Ier que cet art commence à se développer. La famille impériale et les grands personnages laïcs ou religieux donnent une impulsion déterminante à l'art. L'art ottonien emprunte quelques caractéristiques de la période carolingienne mais il est aussi influencé par l'art de l'Antiquité tardive et l'art byzantin. Il permet l'expression d'une nouvelle spiritualité[34]. La basilique Saint-Pierre-aux-Nonnains de Metz en est un bon exemple ainsi que l'église Saint-Cyriaque à Gernrode en Saxe. Cet édifice roman possède un double chœur et des tribunes byzantines. On emploie beaucoup de pierres brutes ou polies (saphirs, rubis, émeraudes) dans le statuaire et les arts décoratifs. De cette époque datent aussi des plaques d'ivoire, cadeau d’Othon Ier à l'évêché de Magdebourg composées de carrés de 12 x 12 encadrés et représentant des scènes religieuses.

Les lettres ne sont pas oubliées. Le propre frère d'Otton, Brunon de Cologne, cultive les lettres et encourage les études[35]. Le moine Widukind de Corvey écrit une célèbre Histoire des Saxons (Rerum Gestarum Saxonicarum libri III) adressée à Mathilde, fille de l'empereur Otton Ier. Un moine anonyme de Saint-Gall écrit l'ancêtre de la chanson de geste, le Waltharius[1]. Notker le Physicien (mort en 975) et Notker Labéo sont les premiers à traduire en langue germanique des ouvrages latins aussi bien profanes que religieux[36].

L'intérêt d'Otton pour les lettres se retrouve dans le choix du précepteur de son fils. Il est impressionné par les connaissances de Gerbert d'Aurillac, futur pape, qui lui a été présenté par Borell II, comte de Barcelone. Il lui confie l'éducation d'Othon II.

[modifier] Descendance

D'une première épouse dont le nom est resté inconnu :

Avec Edith de Wessex, (° 910 - † 29 janv. 946), fille d’Édouard l'Ancien

Avec Adélaïde de Bourgogne, fille de Rodolphe II de Bourgogne, et veuve de Lothaire d'Arles, roi d'Italie.

  • Henry, mort jeune
  • Bruno, mort jeune
  • Mathilde (° v.955 – † 6 février 999), abbesse de Quedlinburg
  • Otton II955 – † 7 décembre 983)

[modifier] Notes et références

  1. abcdefgh Encyclopaedia Universalis, article Allemagne médiévale, DVD, 2007
  2. La société féodale Université de Lille
  3. Le Temps Xe siècle: le renouveau monastique Le Temps
  4. Francis Rapp, Le Saint Empire romain germanique, Tallandier, 2000, p 32
  5. Francis Rapp, p 33
  6. Francis Rapp, p 34
  7. Francis Rapp, p 35
  8. Francis Rapp, p 49
  9. La société féodale Université de Lille
  10. Francis Rapp, p 45
  11. Francis Rapp, p 48
  12. Francis Rapp, p 49
  13. Francis Rapp, p 49
  14. Francis Rapp, p 50
  15. Francis Rapp, p 51
  16. Francis Rapp, p 52
  17. Gérard Rippe, Ivrée, Encyclopaedia Universalis, DVD, 2007
  18. Joseph Rovan, Histoire de l’Allemagne des origines à nos jours, 3e éd. revue et augmentée, Éditions du Seuil, coll. « Points Histoire » nº 254, Paris, 1999 (1re éd. 1994), 974  (ISBN 2-02-18296-3) [détail des éditions], p. 90
  19. Georges Castellan, « Drang nach Osten », l'expansion germanique en Europe centrale et orientale
  20. Otton I le Grand dans Mémo
  21. Francis Rapp, p 53
  22. La Pologne féodale : les Piast
  23. Liutprand de Crémone
  24. Otton Ier le Grand (912-973). Roi de Germanie (936-973) et empereur (962-973)
  25. ab Les relations entre le Saint-Empire et la papauté, d'Otton le Grand à Charles IV de Luxembourg (962-1356) sur [1]. Consulté le 27 octobre 2007
  26. Guido Peeters, Pays-Bas, Encyclopaedia Univzersalis, DVD, 2007
  27. ab encyclopedie universelle, « Le temps des Ottoniens » sur [2]. Consulté le 30 octobre 2007
  28. Jean Dhondt, Les dernières invasions tiré de Histoire de la France des origines à nos jours sous la direction de Georges Duby, Larousse, 2007, page 249.
  29. ab Pierre Riché, Les Carolingiens, une famille qui fit l'Europe, Hachette 1983, p.351.
  30. Pierre Riché, Les Carolingiens, une famille qui fit l'Europe, Hachette 1983, p.351.
  31. Jean Chélini, Histoire religieuse de l'Occident médiéval, Hachette, 1991, p 259
  32. Joseph Rovan, Histoire de l'Allemagne, Le Seuil, 1999, p 91
  33. Encyclopaedia Universalis, article Art ottonien
  34. Encyclopaedia Universalis, article Art ottonien
  35. Jean Chélini, p 259
  36. Jean Chélini, p 260

[modifier] Voir aussi

[modifier] Bibliographie

  • J-P Cuvillier, L'Allemagne médiévale, Paris, 1979-1982, 2 vol.
  • Robert Folz, La naissance du Saint Empire, Paris, 1967
  • Pierre-Roger Gaussin, article Allemagne médiévale, Encyclopaedia Universalis, 1989.
  • Florentine Mütherich, article Art ottonien, Encyclopaedia Universalis, 1989.
  • Michel Parisse, Allemagne et Empire au Moyen Âge, Hachette, 2002.
  • Joseph Rovan, Histoire de l'Allemagne, Le Seuil, 1999
  • Francis Rapp, Le Saint Empire romain germanique, Éditions du Seuil, coll. « Points Histoire », Lonrai, 2003 (ISBN 978-2020555272).

[modifier] Liens internes

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