Lucien de Montagnac

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Lucien-François de Montagnac, né à Pouru-aux-Bois le 17 mai 1803 et tué à la Bataille de Sidi-Brahim le 23 septembre 1845, est un militaire français responsable de nombreux massacres à l'encontre des populations civiles durant la conquête de l'Algérie.

Sommaire

[modifier] Biographie

Sorti de l'École militaire avec le grade de sous-lieutenant le 1er octobre 1821, Montagnac participa à la campagne d'Espagne en 1823 et devint lieutenant le 30 décembre 1827.

Après l'insurrection républicaine à Paris en juin 1832, qu'il réprima sévèrement, Montagnac refusa la Légion d'honneur qui lui était offerte par le roi Louis-Philippe. Il fit valoir qu'il était « résolu à attendre cette récompense d'une occasion où il saurait mieux la mériter ».

Capitaine en 1836, Montagnac est envoyé en Afrique. Mis à l'ordre du jour de l'armée le 4 juillet 1840, il accepta cette fois sa décoration.

Un an après, le 18 juillet 1841, il était élevé au grade de chef de bataillon. Pendant cette période, il s'illustre par sa brutalité à l'égard des populations locales. « Nous nous sommes établis au centre du pays… brûlant, tuant, saccageant tout, écrit-il le 2 mai 1843[1]. Quelques tribus pourtant résistent encore, mais nous les traquons de tous côtés, pour leur prendre leurs femmes, leurs enfants, leurs bestiaux. » Son acharnement n'épargne pas les femmes : « On en garde quelques-unes comme otages, les autres sont échangées contre des chevaux, et le reste est vendu à l’enchère comme bêtes de somme. » [2].

En mai 1843, à la tête de six compagnies d'élite du 61e et d'un détachement de spahis, il se distingua par son intrépidité lors d'un engagement dans lequel il combattit avec le bras droit cassé. Pendant près de deux mois, il se faisait mettre à cheval par ses soldats et marchait avec eux. À l'issue de cette bataille, Montagnac avait perdu l'usage de la main droite et dut apprendre à écrire de la main gauche. Le général Baraguay d'Hilliers fut chargé de lui transmettre les témoignages de satisfaction du ministre de la guerre qui, le 10 mars 1844, le fit élever au grade de lieutenant-colonel.

[modifier] Bataille de Sidi-Brahim

Le 21 septembre 1845, Montagnac était commandant supérieur du poste de Nemours, aujourd'hui Djemaâ Ghazaouet, un petit port de la frontière du Maroc (province d'Oran). Répondant à l'appel des tribus voisines qui craignaient une razzia menée par Abd-el-Kader, le lieutenant-colonel Montagnac avec 450 hommes du 15e Léger se porte à leur secours (390 du 8e Bataillon de Chasseurs d'Orléans et 60 du 2e Régiment de Hussards). Entraîné dans une embuscade, il est attaqué par cinq à six mille cavaliers menés par Abd-el-Kader. La colonne est presque entièrement détruite et une centaine d'hommes sont fait prisonniers. Montagnac, qui marchait en tête de l'avant-garde, est tué dans le combat.

La compagnie de carabiniers restée au camp était parvenue à gagner le fortin de Sidi Brahim où elle résista tant bien que mal aux attaques des assaillants. Les hommes n'avaient pour eux qu'une bouteille d'absinthe, ils durent boire leur urine pour apaiser leur soif; privés de munitions, ils coupèrent en quatre leurs dernières balles. Abd-el-Kader, qui dirigeait lui-même cette attaque, adressa plusieurs lettres écrites en français aux 80 carabiniers pour leur promettre la vie sauve, s'ils consentaient à se rendre; ils refusèrent.

Vers le soir du 2e jour, le capitaine Géraux, seul officier qui n'eût pas été tué, sortit avec ses soldats pour se diriger sur Djemaâ Ghazaouet. À quelques kilomètres du camp, cette petite troupe ne put résister à l'affrontement contre des combattants kabyles. Le capitaine Géraux fut tué et de ses 450 hommes, 10 seulement survécurent.

[modifier] Crimes de guerre

Comme en témoigne une lettre envoyée le 15 mars 1843 à l'un de ses amis pendant la guerre de conquête de l'Algérie, le colonel de Montagnac utilisa des méthodes violentes et criminelles pour vaincre la résistance des tribus arabes : « Toutes les populations qui n'acceptent pas nos conditions doivent être rasées. Tout doit être pris, saccagé, sans distinction d'âge ni de sexe: l'herbe ne doit plus pousser où l'armée française a mis le pied. Qui veut la fin veut les moyens, quoiqu'en disent nos philanthropes. Tous les bons militaires que j'ai l'honneur de commander sont prévenus par moi-même que s'il leur arrive de m'amener un Arabe vivant, ils recevront une volée de coups de plat de sabre. [...] Voilà, mon brave ami, comment il faut faire la guerre aux Arabes : tuer tous les hommes jusqu'à l'âge de quinze ans, prendre toutes les femmes et les enfants, en charger les bâtiments (allusions aux maisons où les militaires exploitaient les femmes sexuellement), les envoyer aux îles Marquises ou ailleurs. En un mot, anéantir tout ce qui ne rampera pas à nos pieds comme des chiens. »[3]

Le militaire n'hésite pas à mettre en scène ses « exploits ». Ayant vaincu un chef ennemi de la province de Constantine, il écrit : « Je lui fis couper la tête et le poignet gauche et j’arrivai au camp avec sa tête piquée au bout d’une baïonnette et son poignet accroché à la baguette d’un fusil. On les envoya au général Baraguay d’Hilliers qui campait près de là, et qui fut enchanté, comme tu le penses… »[4]

[modifier] Voir aussi

[modifier] Bibliographie

« Lucien de Montagnac », dans Charles Mullié, Biographie des célébrités militaires des armées de terre et de mer de 1789 à 1850, 1852 [détail édition](Wikisource)

  • Robert Louzon, « Cent ans de capitalisme en Algérie », paru dans La Révolution prolétarienne n°99, mars 1930 et n°104, mai 1930.

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens externes

[modifier] Notes

  1. Montagnac, Lettres d’un soldat, Plon, Paris, 1885, réédité par Christian Destremeau, 1998.
  2. Lettre datée du 31 mars 1842
  3. Montagnac, Lettres d'un soldat, p. 153
  4. Montagnac, Lettres d’un soldat, p. 297 et 299