Indigénat

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Le régime de l'indigénat est un cadre légal pratiqué dans les colonies françaises du milieu du XIXe siècle à 1944-1947. Mis en place d'abord en Algérie, il est généralisé à l'ensemble de l'empire français à partir de 1889. Ce régime a aussi été employé dans l'Empire britannique, portugais ou néerlandais.

Sommaire

[modifier] Genèse du statut d'indigénat

L'Algérie française constitue dès 1830 la première colonie française moderne. Le traité de capitulation du bey d'Alger stipule que la France s'engage à ne pas porter atteinte à la liberté des habitants et à leur religion. Le terme d'« indigène » est déjà en usage dès 1830 pour qualifier les gens du cru qui, juifs ou musulmans, ne sont pas considérés comme Français avant l'ordonnance royale du 24 février 1834. Ils n'ont toutefois pas la nationalité pleine et entière. Napoléon III modifie la situation en permettant à partir de 1865 la naturalisation pleine et entière aux juifs et musulmans d'Algérie qui en font la demande.

Les juifs d'Algérie (1870-1871), puis les « étrangers » (1889) deviennent des citoyens français à part entière. En revanche, l'opposition est vive pour accorder ce même droit aux musulmans. Aussi, c'est à la demande des élus d'Algérie que la loi de 1889 rétablissant le droit du sol sur l'ensemble du territoire, Algérie incluse, n'est pas appliquée aux musulmans.

Né en Algérie, le statut de l'indigénat est généralisé à l'ensemble de l'empire français à partir de 1889. Les protectorats (Tunisie et Maroc par exemple) ne furent pas concernés.

[modifier] Le régime de l'indigénat

Le régime d'indigénat est mis en place dès 1830. Il établit un régime d'exception pour les colonisés. Ces derniers ne sont pas tenus de respecter les lois françaises et ne dépendent pas de la juridiction française. Ils suivent la loi coranique et la justice est rendue selon la coutume coranique. Ceci reste valable jusqu'à l'abrogation du régime de l'indigénat en 1945. Pour être admis a la nationalité française pleine et entière, quand cela est possible, le musulman doit renoncer à suivre la loi coranique et s'engage à suivre la loi de la République. Il existait en effet de profondes différences entre les lois coraniques et le Code civil : polygamie, divorce uniquement possible pour le mari, inégalité homme/femme en matière d'héritage, notamment.

Dès 1874, une liste d'infractions punissables par la justice française est dressée à destination des indigènes : réunion sans autorisation ou acte irrespectueux, notamment.

Dès les années 1860, le statut d'indigénat fait débat. Napoléon III qui rêvait d'un royaume arabe en Algérie était évidemment très mal considéré par les colons français. Après la chute du Second Empire, la République tenta bien de simplifier les procédures de naturalisation et même d'évoquer une naturalisation en masse, mais ceci provoque de vives réactions des colons. Les autorités locales traineront d'ailleurs des pieds afin de compliquer la tache aux musulmans candidats à la naturalisation française. Cette méthode porte ses fruits : entre 1865 et 1915, seulement 2396 musulmans d'Algérie sont naturalisés français.

Les indigènes bénéficient du droit de vote limité. Ils participent ainsi notamment à l'élection des collèges musulmans des conseils municipaux. Ces derniers sont évidemment minoritaires au sein des conseils alors que la population musulmane est le plus souvent majoritaire au niveau démographique. Les musulmans représentent un cinquième du conseil jusqu’en 1919, puis un tiers.

Après la Première Guerre mondiale, la loi du 4 février 1919 réforme la procédure d'accès à la pleine nationalité. Cette réforme est décevante avec seulement 1204 musulmans d'Algérie naturalisés de 1919 à 1930. Hubert Lyautey qui suit de près les négociations avec les colons note : « Je crois la situation incurable. Les colons agricoles français ont une mentalité de pur Boche, avec les mêmes théories sur les races inférieures destinées à être exploitées sans merci. Il n'y a chez eux ni humanité, ni intelligence. » (cité par Weil Patrick, Qu'est-ce qu'un Français, Paris, Grasset, 2002, p.241)

Le régime de l'indigénat est démantelé en trois temps. L'ordonnance du 7 mars 1944 supprime le statut pénal de l'indigénat. La loi Lamine Guèye du 7 avril 1946 reconnaît la nationalité française pleine et entière à tous les Français, indigènes inclus. Enfin, le statut du 20 septembre 1947 impose les principes d'égalité politique et d'accès égal aux emplois de la fonction publique. Mise en application très lentement dans les faits, cette abrogation du statut de l'indigénat devient réelle en 1962. À cette date, l'Algérie devient indépendante et la loi française intègre la notion du double jus soli. Ainsi, tous les enfants nés en France d'un parent algérien sont français dès leur naissance.

[modifier] Bibliographie

[modifier] Voir aussi

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