Grippe

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Souche de l'agent responsable de la pandémie de 1968 : grippe de 1968 (« grippe de Hong Kong »). Les projections extérieures de la surface contiennent les récepteurs par lesquels le virus s'attache aux cellules épithéliales du tractus respiratoire
Souche de l'agent responsable de la pandémie de 1968 : grippe de 1968 (« grippe de Hong Kong »). Les projections extérieures de la surface contiennent les récepteurs par lesquels le virus s'attache aux cellules épithéliales du tractus respiratoire

La grippe (ou influenza) est une maladie infectieuse fréquente et hautement contagieuse causée par trois virus à ARN de la famille des Orthomyxoviridae (Myxovirus influenzae A, B et C), touchant les oiseaux et certains mammifères dont l'Homme.

La transmission de la grippe est typiquement inter humaine par voie respiratoire, via des gouttelettes riches en virus provenant de la toux et des éternuements des sujets infectés. Elle peut également être transmise par la salive, les sécrétions nasales, les matières fécales et le sang, soit par contact direct soit par l'intermédiaire de surfaces contaminées. Le contact avec des oiseaux infectés ou leurs fientes est plus rarement en cause. Chez l'être humain, ses symptômes les plus fréquents sont la fièvre, les céphalées, la toux, les maux de gorge, les douleurs musculaires, l'asthénie et la perte d'appétit, accompagnés d'un sentiment de malaise général. Ces symptômes, éléments du syndrome grippal dont la grippe n'est qu'une cause parmi d'autres, font évoquer le diagnostic par la soudaineté de leur apparition, leur survenue en période d'épidémie grippale et leur disparition habituelle après quelques jours d'évolution. Dans les cas les plus sérieux, la grippe se complique de pneumonies parfois fatales.

Banalisée dans l'esprit populaire comme synonyme de rhume ou de « coup de froid », la grippe est une maladie autrement sérieuse et un problème majeur de santé publique à l'échelle planétaire[1]. Sévissant sur un mode épidémique saisonnier, elle est responsable dans le monde d'une morbidité élevée et de la mort de plusieurs centaines de milliers de personnes chaque année, essentiellement de jeunes enfants et des vieillards. Le coût sanitaire et social annuel de la grippe est ainsi évalué à plusieurs milliards de dollars aux États-Unis, et à 460 millions d'euros en France pour une épidémie moyenne[2]. Indépendamment des épidémies, des pandémies grippales sont susceptibles de survenir lors de l'émergence de nouvelles souches virales. Depuis son apparition dans les années 1990 en Asie, la souche de virus aviaire de type A sous-type H5N1 fait planer le risque d'une nouvelle pandémie grippale ; cependant ce virus n'est pas à l'heure actuelle transmissible d'homme à homme[3].

La prévention de la grippe repose sur la vaccination, proposée dans la plupart des pays industrialisés aux personnes à risque[4] et administrée aux volailles d'élevage[5]. Une vaccination annuelle est nécessaire en raison de la variabilité antigénique des virus grippaux. Des antiviraux sont disponibles pour le traitement et la prophylaxie de la grippe, parmi lesquels les inhibiteurs de la neuraminidase tiennent aujourd'hui une place de choix.

Sommaire

[modifier] Histoire

[modifier] Observations épidémiologiques

Les symptômes de la grippe humaine ont été clairement décrits par Hippocrate il y a près de 2 400 ans[6],[7]. Tite-Live décrivit dans la Rome antique des épidémies brutales qui semblent rétrospectivement pouvoir être attribuées à la grippe. Depuis lors, le virus a été responsable de nombreuses pandémies. Les données historiques concernant la grippe sont difficiles à interpréter, car le syndrome grippal se rencontre également dans d'autres maladies épidémiques (diphtérie, peste bubonique, fièvre typhoïde, dengue, typhus). La première observation convaincante remonte à 1580, avec une pandémie qui partit d'Asie et s'étendit à l'Europe et à l'Afrique. Plus de huit mille morts furent comptés à Rome et plusieurs villes espagnoles furent frappées. Les pandémies se poursuivirent de façon sporadique aux XVIIedécrite par Jussieu en 1729[8] et au XVIIIe siècles, avec une pandémie particulièrement étendue entre 1830 et 1833 (un quart des personnes exposées auraient été infectées)[9]. Ce n'est qu'à partir des années 1850 qu'une description systématique des épidémies fut entreprise par le britannique Theophilus Thompson[10].

Courbe de la mortalité par grippe espagnole dans quatre grandes villes du monde entre 1918 et 1919.
Courbe de la mortalité par grippe espagnole dans quatre grandes villes du monde entre 1918 et 1919.

La pandémie la plus connue et la plus meurtrière connue à ce jour est celle de la « grippe espagnole » (virus influenza A, sous-type H1N1) qui sévit entre 1918 et 1919. Les plus anciennes estimations parlent de quarante à cinquante millions de morts[11] tandis que des évaluations plus récentes livrent le chiffre de cinquante à cent millions de morts dans le monde,[12] ce qui en ferait une des plus graves catastrophes sanitaires de tous les temps, au même titre que la peste noire de 1347-1350[9]. Une autre particularité de cette pandémie est qu'elle tua principalement de jeunes adultes, 99 % des décès étant survenus avant soixante-cinq ans et plus de la moitié entre vingt et quarante ans[13]. Cette forte létalité s'explique par un taux d'attaque très élevé (près de 50 % des personnes exposées) et par la sévérité extrême des symptômes, dont on suspecte qu'elle soit liée à une réaction immunitaire excessive (« orage cytokinique »)[11]. Les symptômes, inhabituels pour une grippe, firent d'abord passer la maladie pour une dengue, un choléra ou une fièvre typhoïde. Un observateur écrivit « une des complications les plus frappantes était une hémorragie des muqueuses, particulièrement de celles du nez, de l'estomac et des intestins. Des saignements auriculaires et des hémorragies pétéchiales survenaient également »[12]. La majorité des décès firent suite à des surinfections, notamment des pneumonies bactériennes, mais le virus tua aussi directement en causant des hémorragies et des œdèmes pulmonaires massifs dépassant les possibilités thérapeutiques de l'époque[14].

Icône de détail Article détaillé : Grippe espagnole

Les pandémies suivantes furent moins dévastatrices. La « grippe asiatique » de 1957 (virus de type A, souche H2N2) et la « grippe de Hong Kong » de 1968 (virus de type A, souche H3N2) firent malgré tout des millions de morts dans le monde. Le développement des antibiotiques, en permettant le traitement des surinfections bactériennes, pourrait avoir joué un rôle non négligeable dans la diminution de la mortalité[14]. De nouvelles menaces virent le jour dans le New Jersey en 1976 (« grippe du cygne »), dans le monde entier en 1977 (« grippe russe ») et depuis 1997 à Hong Kong et dans d'autres pays asiatiques avec le virus H5N1. Toutefois depuis 1968, l'immunité acquise contre les souches des précédentes pandémies et la vaccination ont limité l'expansion du virus et peuvent avoir aidé à prévenir le risque de nouvelles pandémies[15].

Principales Pandémies grippales connues[15],[9]
Pandémie Date Décès Sous-type impliqué Index de sévérité
Grippa asiatique (russe) 1889–1890 1 million peut-être H2N2  ?
Grippe espagnole 1918–1920 30 à 100 millions H1N1 5
Grippe asiatique 1957–1958 1 à 1.5 million H2N2 2
Grippe de Hong Kong 1968–1969 0.75 à 1 million H3N2 2

[modifier] Découvertes microbiologiques

La grippe a pu être faussement attribuée à une bactérie jusqu'à ce que les agents étiologiques de la grippe, les virus de la famille des Orthomyxoviridae, soient identifiés chez le porc par Richard Shope en 1931[16]. Cette découverte fut bientôt suivie par l'isolement du virus chez les humains par un groupe de recherche dirigé par Patrick Laidlaw au Medical Research Counsil (Conseil de recherche médicale) du Royaume-Uni en 1933[17]. Cependant il fallut attendre que Wandell Stanley cristallise le virus de la mosaïque du tabac en 1935 pour que la nature non-cellulaire des virus soit connue.

La première étape importante vers la prévention de la grippe fut le développement, en 1944, d'un vaccin à base de virus grippal trouvé par Thomas Francis, Jr., avec le soutien de l'armée américaine[18]. Cette découverte se basait sur les travaux fondamentaux de Frank Macfarlane Burnet, qui démontra que le virus perdait sa virulence lorsqu'il était cultivé dans des œufs de poule embryonnés[19]. L'armée américaine, durement frappée par la grippe durant la Première Guerre mondiale, s'impliqua activement dans ces recherches[12].

[modifier] Terminologie

Le mot « influenza » a été utilisé pour la première fois en Angleterre au XVIIIe siècle lors de l'épidémie de 1743, pour qualifier la grippe. Il semble provenir de l'expression italienne « influenza di freddo » (influence du froid). Il rappelle le caractère saisonnier de la maladie, qui laisse supposer l'influence de l'environnement extérieur sur l'homme. Le virus est réputé mieux survivre à l’extérieur de l’organisme par temps sec et froid, raison pour laquelle les épidémies saisonnières surviennent en hiver dans les climats tempérés. Néanmoins les pandémies se sont montrées actives sur toute la planète, et le virus aviaire H5N1 semble adapté (variants ?) aux zones tempérées et froides (Sibérie), comme aux zones chaudes puisqu'il a surtout sévi en Asie du Sud est et en Indonésie, avec quelques foyers en Afrique, dans la zone tropicale.

Le mot français grippe aurait une origine germanique, Grippen signifiant « saisir brusquement ». Autrement dit : on n’attrape pas la grippe, c'est elle qui nous « agrippe ». La grippe était aussi nommée folette en 1733.

Le virus grippal infecte d'autres mammifères que l'Homme ; terrestres et marins. Mais c'est chez l'oiseau qu'elle est la plus fréquente. Chez l’animal on l'appellera longtemps « peste aviaire », « grippe aviaire » ou « grippe du poulet ». L'évolution terminologique chez l'animal est due à deux raisons. La première, l'identification de deux groupes de virus causaux de ce que l'on avait dénommé peste, d'où la segmentation en maladie de Newcastle et influenza, deuxiémement la décision de ne se préoccupper, au niveau sanitaire, que des virus influenza hautement pathogènes pour l'espèce Gallus gallus. Au symposium de Beltsville (1981), on décide de ne plus parler de « peste du poulet » mais « d’influenza hautement pathogène », bien que le caractère pathogène ne dépende pas uniquement du virus, mais aussi de l'immunité de l'individu infecté.

[modifier] Virologie

Les virus de la grippe sont des virus à ARN. Ils appartiennent à la famille des Orthomyxoviridae et au genre Influenzavirus, dont il existe trois types A, B et C distingués par l'antigénicité de leurs nucléoprotéines. Parmi les virus de type A, qui sont les plus fréquents et les plus virulents, on distingue plusieurs sous-types sur la base de leurs antigènes de surface, l'hémagglutinine (H1 à H15) et la neuraminidase (N1 à N9)[20]. Les virus de type A et B sont responsables des épidémies grippales annuelles, mais seuls les virus de type A sont à l'origine des pandémies grippales. Le virus de type C semble lié à des cas sporadiques et donne le plus souvent une grippe d'expression modérée. Les virus A et C infectent plusieurs espèces, tandis que le virus B est presque spécifique de l'espèce humaine (on ne le rencontre sinon que chez les phoques)[21],[22].

[modifier] Structure de la particule virale

Virus de la grippe en microscopie électronique
Virus de la grippe en microscopie électronique

La particule virale est constituée d'une enveloppe lipidique hérissée de spicules formées par les glycoprotéines de surface. Les virus A et B ont deux glycoprotéines de surface, l'hémagglutinine (H) et la neuraminidase (N).

L'hémagglutinine, qui représente environ 40% des glycoprotéines de surface, est formée par l'association de deux sous unités, HA1 et HA2, reliées par un pont disulfure. L'association de trois monomères HA forme une spicule d’hémagglutinine à la surface de la particule virale. L'hémagglutinine permet la fixation du virus sur l'acide sialique terminal des cellules de l'épithélium cilié de l'arbre respiratoire : elle est très immunogène induisant la production d'anticorps dont certains peuvent être neutralisants.
L'hémagglutinine favorise également la fusion des membranes virales et cellulaires au cours de la phase de pénétration du virus.

La neuraminidase (ou N-acetyl-neuraminyl-hydrolase), est une sialidase présente sous la forme d'homotétramères à la surface de la particule virale. Elle permettrait la libération de virions néoformés en lysant les acides sialiques à la surface de la cellule, ce qui détache l'hémagglutinine et donc la particule virale.

Dans le cas du virus de type C, il n'y a qu'une sorte de spicule à la surface de la particule virale qui assure les fonctions à la fois de l'hémagglutinine et de la neuraminidase.

En plus des glycoprotéines de surface, l'enveloppe virale est constituée de deux autres protéines virales : la protéine de matrice, M1, qui sous-tend l'ensemble de l'enveloppe virale et la protéine M2 qui joue le rôle de canal ionique pour les virus de type A. Pour les virus de sous-type B, une protéine de surface NB s'insère dans la bicouche lipidique et assurerait des fonctions équivalentes à celles de la protéine M2 des virus de type A. Enfin, une protéine CM2 serait l'homologue pour les virus de type C.

À l'intérieur de la particule virale, le génome viral est présent sous la forme de sept ou huit nucléocapsides de symétrie hélicoïdale qui résultent chacune de l'association d'une molécule d'ARN et de nombreuses molécules de nucléoprotéine, NP. Cette protéine fait partie des antigènes internes du virus : elle détermine le type viral A, B ou C. Trois polymérases, PA (protéine acide), PB1 et PB2 (protéine basique 1 et 2, respectivement), forment le complexe réplicase/transcriptase et sont associées aux nucléocapsides. Le génome des virus A et B est constitué de huit segments d'ARN alors que celui du virus C n'en comporte que sept.

Le virus de la grippe reste pathogène durant environ une semaine à température corporelle, plus de trente jours à zéro °C et presque indéfiniment à des températures très basses (par exemple les lacs du nord-est de la Sibérie). La plupart des souches de virus grippal sont aisément inactivées par les désinfectants et les détergents[23],[24],[25].


[modifier] Classification et nomenclature

La classification des virus grippaux ne s’applique qu’aux virus de type A dont certains sont hautement pathogènes pour l’homme.

Elle s'appuie sur les propriétés antigéniques de l'hémagglutinine et de la neuraminidase : il existe 16 sous-types H et 9 sous-types N pouvant donner 16X9 combinaisons possibles. Chez l'homme on retrouve des virus à H1, H2, H3 et N1 ou N2 responsables de la grippe annuelle. Tous les sous types existent dans le monde aviaire avec des virus ayant une pathogénicité très variable pour les oiseaux. Actuellement un virus hautement pathogène H5N1 (avec une hémagglutinine de sous-type H5 et une neuraminidase de sous-type N1) se propage sous la forme d'une panzootie d'influenza aviaire et se transmet de manière très rare à l'homme ; on parle alors de grippe aviaire. D'autres souches (H5 ou H7) sont transmissibles à l'homme sans toutefois entrainer le même pouvoir pathogène. D'autres souches atteignent d'autres espèces de mammifères tels que les chevaux, le porc, etc. La nomenclature des virus grippaux est la suivante : type / animal chez lequel il a été isolé, sauf si c'est l'homme / lieu d'isolement de la souche virale / numéro de la souche / année d'isolement (sous-type). Pour le virus de la grippe aviaire, le terme « H5N1 » est très réducteur. En effet, actuellement, différentes souches virales circulent avec des pouvoirs pathogènes très variables : par exemple, les souches A/chicken/Shantou/423/2003(H5N1) ou A/bar-headed goose/Qinghai/5/2005(H5N1).

[modifier] Variabilité des virus grippaux

Les virus grippaux évoluent et mutent selon deux mécanismes : les glissements antigéniques (ou drift) ou les cassures antigéniques (shift).

Les glissements sont des variations antigéniques discrètes et continues qui ne modifient pas la structure antigénique globale du virus et permettent donc de conserver une immunité partielle à court terme. Ces glissements sont dus aux mutations qui se produisent au moment de la synthèse des ARN viraux en raison du taux élevé d'erreurs de l'ARN polymérase virale. Pour tenir compte des glissements antigéniques, les vaccins grippaux sont donc préparés chaque année à partir des souches virales ayant circulé l'année précédente. En février de chaque nouvelle année, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) fixe les souches virales qui composeront le vaccin antigrippal de l'année suivante, en fonction des données épidémiologiques résultant de la surveillance des virus influenza circulants. En 2005, l'OMS a demandé le remplacement de la souche influenza A/Fujian/411/2003(H3N2) par la souche A/California/7/2004(H3N2) pour la préparation des vaccins antigrippaux.

Les cassures antigéniques sont des changements radicaux de la structure de l'hémagglutinine. Elles résultent de réassortiments génétiques survenant entre des virus de sous-types différents. Ces réassortiments aboutissent notamment au remplacement d'un type d'hémagglutinine par un autre. L'antigène nucléoprotéique NP, lui, est conservé, il s'agit toujours d'un virus de type A. L'immunité préexistante à ce changement est sans effet sur le nouveau virus si bien que les grandes pandémies surviennent suite à des cassures antigéniques. À l’heure actuelle, les spécialistes craignent une recombinaison génétique entre un virus de la grippe aviaire A(H5N1) et un virus humain circulant qui pourrait donner naissance à un nouveau virus hautement pathogène pour l’homme.

[modifier] Caractère saisonnier

La grippe est nettement plus fréquente et épidémique en hiver, sauf en zone équatoriale et lors de certaines pandémies. Ce phénomène est mal compris. On y a vu plusieurs explications ;

  • affaiblissement des défenses immunitaires par le froid (hypothèse non confirmée chez des cochons d'inde élevés en atmosphère contrôlée ; En laboratoire, le froid ne s'est pas montré capable d'affaiblir leur immunité qui est restée identique à 5, 20 et 30 °C)[26] ;
  • diminution saisonnière de l'immunité, par exemple en raison d'un moindre apport de vitamines ;
  • diminution du taux d'UV en hiver, permettant une survie plus durable du virus dans l'environnement ;
  • synergie possible avec d'autres infections bactériennes favorisées à cette saison ;
  • lien avec le phénomène de migration des oiseaux (on sait que certains oiseaux dont les canards peuvent être porteurs sains et tous les oiseaux sont vecteurs potentiels de grippe, et ils peuvent au retour de migration apporter des virus qui ont suffisamment muté les mois précédents pour être à l'origine d'une souche épidémique), mais les migrations sont pour partie plus précoces que les dates d'apparition de la grippe.
  • caractéristiques virales ; Des expériences[26] d’élevage et transmission du virus chez des cochons d’Inde élevés en environnement contrôlé montrent que 2 facteurs semblent déterminants ;
    • la température ; l’air froid (5 °C) semble favoriser la transmission virale, qui est freinée à 20 °C et presque nulle à 30 °C. Le froid pourrait favoriser le virus en rendant le dégagement des voies respiratoires plus difficile (mucus plus épais et plus abondant).
    • l’hygrométrie ; Un air sec (20 % à 35 % d’humidité relative) favorise également la contagion par l’air.

Dans un air sec et froid, le virus grippal serait donc plus stable et plus durablement infectieux. Une température de plus de 20 °C associée à une humidité relative d'au moins 50 % semble défavoriser la contagion (hors contact physique direct). Néanmoins, des foyers infectieux importants sont constatés en zone tropicale et équatoriale, chez la volaille et chez l'homme.

Confirmant ces résultats, mais leur donnant une autre explication, une étude du National Institute of Health américain, publié dans Nature Chemical Biology début 2008, indique que « le virus de la grippe est enveloppé d’une couche de molécules grasses qui durcit et le protège quand les températures baissent. Cette enveloppe, constituée de cholestérol, fond une fois que le virus a pénétré dans l’appareil respiratoire de sa victime, il peut alors infecter une cellule et se reproduire. Lorsqu’il fait trop chaud la couche protectrice ne résiste pas et le virus meurt, à moins d’être à l’intérieur d’un organisme, ce qui explique sa propension à sévir en hiver. [...] Résultat : une température de 5°C et un degré d’humidité de 20% sont parfaits pour que les hamsters malades contaminent les autres. A 30°C les chercheurs n’ont observé aucune transmission virale[27]. »

[modifier] Épidémiologie en France

[modifier] Données épidémiologiques générales

En France métropolitaine, la surveillance[28] de la grippe a d'abord été faite par deux réseaux de médecins libéraux. Le réseau Sentinelles de l'Inserm et le réseau des GROG (Groupes Régionaux d'Observation de la Grippe) et sur une surveillance virologique faite par deux Centres Nationaux de référence (Institut Pasteur, Paris pour la partie nord de la France, et CHU de Lyon pour la moitié sud). Dans le cadre du plan pandémie, ce réseau a été peu à peu complété (de 2003 à 2007) par :

  1. un réseau de surveillance de la mortalité spécifique en temps presque réel (via le suivi des certificats de décès d'environ 35% de la population métropolitaine, par 22 Ddass),
  2. un monitoring des grippes graves (via un réseau de 46 services d’urgences (Réseau Oscour)
  3. un signalement des épidémies déclarées par les collectivités de personnes âgées. (Le délai moyen de signalement à l'INVS est passé de 21 à 10 jour de 2003 à 2007)

Dans les Antilles Françaises, la surveillance est assurée toute l’année par 39 médecins libéraux sentinelles en Guadeloupe et 59 en Martinique. La cellule de Veille Sanitaire (CVS) de la Direction de la Santé et du Développement Social (DSDS) et la Cire Antilles-Guyane coordonnent ces deux réseaux.

Les personnes infectées sont contagieuses tant que durent les symptômes.

[modifier] Données épidémiologiques hospitalières

L’Institut de veille sanitaire (InVS) recueille quotidiennement et automatiquement auprès de 38 établissements hospitaliers des données relatives à l’activité syndromique, dont la grippe, des services d’urgences. 23 établissements sont situés en Ile de France (couverture : 25 % des services d’urgences), 14 situés en France métropolitaine en dehors de l’Ile de France (couverture : environ 1 % des passages aux urgences) et 1 hôpital sur l’île de la Réunion. Le réseau OSCOUR couvre environ 10 % des passages aux urgences en France.

[modifier] Données de mortalité par grippe

La Ddass du département le plus peuplé de chacune des 22 régions de la métropole rapporte chaque semaine à l’InVS le nombre de certificats de décès comportant les mots « grippe », « grippal » ou « grippaux » dans l’indication des causes de décès par semaine de décès. Des informations individuelles portant sur le sexe, l’âge, le lieu de décès sont renseignées.

[modifier] Pandémie grippale

Les réassortiments génétiques peuvent être à l'origine de grandes pandémies mondiales de grippe. On en dénombre trois au cours du XXe siècle, en 1918 (« grippe espagnole »), 1957 (« grippe asiatique »), et 1968 (« grippe de Hongkong »). Ces pandémies sont caractérisées par une morbidité et une mortalité élevées. Ainsi la « grippe espagnole » en 1918 et 1919 de 30 à 100 millions de victimes (selon les évaluations, 40 millions selon le site de l'Institut Pasteur), dont plus de la moitié chez les jeunes adultes. Le virus en cause, proche de la grippe porcine, était très différent de ceux circulants à l'époque.

[modifier] Diagnostic

[modifier] Diagnostic clinique

La période d'incubation est courte (1-2 jours). La maladie débute brutalement par une fièvre supérieure à 38,5 °C avec frissons, des céphalées, une sensation de malaise général avec des douleurs diffuses en particulier des muscles (myalgies) et des articulations (arthralgies). À ce tableau s'ajoutent des signes d'irritation conjonctivale-laryngo-trachéale ou bronchique (toux sèche). La fièvre dure 3 à 5 jours, la guérison est rapide mais une asthénie peut persister plusieurs semaines.

Bien que les nausées et les vomissements puissent être rencontrés dans la grippe, surtout chez les enfants, ils sont plus souvent l'expression d'une gastroentérite virale dont l'épidémiologie est également hivernale[29].

Les formes compliquées sont rares mais graves : œdème aigu du poumon, myocardites, formes neurologiques. Des complications liées à une surinfection bactérienne sont fréquentes : otites, bronchites, pneumonie.

La grippe grave ne doit jamais être méconnue du fait de la possibilité de décès : il faut savoir que la grippe est la seconde cause de mortalité par maladie infectieuse en France, (2000 à 4000 décès par an en France), (derrière la pneumonie à pneumocoque). Ce tableau clinique particulier associe des signes aspécifiques de grippe avec une insuffisance respiratoire aiguë, et parfois défaillance multi-viscérale. Elle est toujours consécutive à l'infection d'un sujet fragilisé.

[modifier] Diagnostic virologique

Le tableau clinique du syndrome grippal peut être induit par d'autres virus (paramyxovirus, adénovirus qui produisent des syndromes fébriles douloureux). Le diagnostic de certitude est essentiel pour dater le début d'une épidémie.

Le diagnostic se fait par l'analyse de prélèvements respiratoires : écouvillonnage nasal, aspiration naso-pharyngée. En cas de pneumopathie, notamment chez l'adulte, un liquide de lavage bronchoalvéolaire peut être prélevé.

La détection rapide du virus par une technique immunologique (immunofluorescence indirecte, tests immunophorétiques rapides, ...) est la plus employée, car produisant un résultat en 3 à 4 heures, pour un coût faible, en répondant aux exigences de sensibilité et de spécificité des laboratoires de virologie.

De plus en plus de laboratoires utilisent aussi des techniques de biologie moléculaire : extraction de l'ARN viral du prélèvement, puis RT-PCR en point final ou RT-PCR quantitative. Ces techniques permettent un diagnostic assez rapide (moins de 2 heures pour l'extraction suivie de la RT-PCR quantitative) et fiable, qui a l'avantage aussi de permettre un premier typage. La RT-PCR peut ensuite être complétée par un séquençage du génome viral, dans un but essentiellement épidémiologique. C'est par exemple ce qui est réalisé dans les Centre Nationaux de Référence de la grippe en France.

L'isolement du virus sur culture cellulaire (cellules de reins de chien, MDCK) est exceptionnellement nécessaire. Il est utile pour le suivi épidémiologique annuel de la grippe. En l'absence d'effet cytopathogène du virus, la culture doit être complétée par une réaction d'hémagglutination (HA), d'inhibition d'hémagglutination (IHA) ou d'immunofluorescence (IF).

Prospective : En septembre 2007, une équipe[30] a annoncé[31] disposer d'un analyseur de poche capable de détecter (par puce) le H5N1 dans un échantillon de mucus ou de selles (humain ou aviaire), en moins de 30 mn. Selon l'équipe, il est "aussi sensible, 440% plus rapide et 2.000 à 5.000% moins coûteux" que les meilleurs tests existants, et pourrait être adapté au SRAS, au VIH, au SIDA, à l'hépatite B. La production commerciale n'en est toutefois pas faite, et l’OMS semble rester prudente en attendant d’en savoir plus.

[modifier] Prévention et traitement

Outre l'hygiène, la vaccination dans les pays où elle est accessible semble être la meilleure parade, avec des taux de protection par les vaccins de l'ordre de 60 % (jusqu'à 90 % pour la grippe saisonnière). Elle en diminue significativement le nombre d'hospitalisation ainsi que la mortalité[32]. La quarantaine est un moyen efficace, mais difficile à mettre en œuvre.

Dans certains pays (France, Belgique) les sujets à risque ; plus de 65 ans, insuffisance respiratoire chronique, atteintes cardiaques ou rénales, etc. ont droit à une vaccination gratuite. Elle est recommandée aux professionnels de santé et aux personnes travaillant à des postes « socialement » exposés (enseignants, administration, transports en commun...)

Le vaccin le plus commun est une suspension de particules virales inactivées et purifiées qui offre une protection contre trois souches virales. Le plus souvent il comporte des particules de deux sous-types de virus influenza A et d'un sous-type de virus influenza B[33].

Il existe des médicaments antiviraux :

  • l'amantadine et la rimantadine, qui ont une efficacité de l'ordre de 80 % si administrés à titre préventif ;
  • l'oseltamivir (Tamiflu®) et le zanamivir (Relenza®) sont des inhibiteurs de la neuraminidase. Ces traitements, pris précocement, peuvent diminuer un peu l'importance des symptômes et la durée de l'affection. Mais ils sont coûteux, ne sont pas remboursés par la sécurité sociale en France, en Belgique et en Suisse et doivent être pris dans les 48 heures après l'apparition des symptômes.

La vitamine C peut être indiquée contre l'asthénie passagère due au syndrome grippal.

[modifier] Anecdotes

Les médecins ont rapidement repéré que les épidémies se produisaient presque toutes de novembre à avril dans l'hémisphère nord et d'avril à octobre dans l'hémisphère sud, ce qu'on a d'abord expliqué par la conjonction des planètes. Certains avaient en effet noté des coïncidences qu’ils ont jugés troublantes entre les dates de début d'épidémie et certains évènements astronomiques (taches solaires, flux de protons, position de Vénus, etc.) ; bien avant l'invention de la science-fiction, on avait imaginé des microbes venus du ciel ou de l'espace (de Vénus). Puis c'est l'influence des modifications météorologiques et du froid qui a été jugée le facteur déclenchant.

De nouvelles questions se posent, par exemple à propos des impacts sur le virus du rayonnement ultraviolet (mutagène ?), de la radioactivité (facteur mutagène ?), des biocides, des désinfectants, de l’appauvrissement génétique des populations d’oiseaux ou d'autres porteurs, de l’impact éventuel d'autres polluants mutagènes ou affaiblissant l'immunité, ou encore d’aspects nosocomiaux liés aux vaccins, aux hospitalisations, à l'hygiène dans les écoles ou maisons de retraite, etc. Ces questions restent ouvertes alors que l'écologie du virus n'est pas encore comprise, tout particulièrement pour le virus IA H5N1 HP qui se développe depuis 1996 et qui depuis 2003 présente les caractéristiques d'un virus susceptible — s'il mutait pour devenir plus contagieux — de provoquer une pandémie.

[modifier] Notes et références

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