Esprit

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L'esprit est constitué par l'ensemble des facultés intellectuelles. Dans de nombreuses traditions religieuses, il s'agit d'un principe de la vie incorporelle de l'être humain. En philosophie, la notion d'esprit est au cœur des traditions dites spiritualistes. On oppose en ce sens corps et esprit (nommé plus volontiers conscience par la philosophie et âme par certaines religions. En psychologie contemporaine, le terme devient synonyme de l'ensemble des activités mentales humaines, conscientes et non-conscientes.

  • En métaphysique et dans les religions, le mot esprit désigne normalement l'élément immatériel incarné en l'être humain.[1]
  • Par extension se dit aussi de tous les êtres immatériels conçus comme ayant une vie psychique : Dieu, les anges, les démons, etc.
  • En psychologie, le mot esprit désigne les processus mentaux et la faculté de penser propre à l'homme. Ce terme fut parfois rejeté pour les connotations religieuses ou spiritualistes qu'il convoyait, les auteurs en particulier dans l'école psychanalytique lui préférant le plus neutre psyché. Depuis la fin du XXe siècle, sous l'influence des écrits anglophones, le mot esprit a retrouvé un usage plus fréquent comme traduction du terme mind. On retrouve, par exemple, l'expression dans le titre français d'un ouvrage de vulgarisation par Steven Pinker, Comment fonctionne l'esprit.
  • Dans le langage ordinaire, le mot esprit renvoie non seulement à l'activité mentale mais aussi à certaines facultés ou dons intellectuels, particulièrement de vivacité, de finesse, d'humour.

Sommaire

[modifier] Origine

Le mot esprit vient du latin « spiritus » (dérivé de spirare = souffler) qui signifie souffle, vent. Il a aussi notamment donné les mots inspirer (lat. inspirare) et expirer (lat. expirare). Esprit, ou spiritus, est aussi la traduction du grec pneuma et de l'hébreu ruach.[2]

Le mot esprit pouvait se donner à tout ce qui est fort subtil et très actif, on le retrouve donc dans des expressions de l'ancienne chimie comme esprit de vin (alcool) ou esprit de sel (acide chlorhydrique).

[modifier] Évolution de la définition

[modifier] L'esprit et le christianisme

Dans la première épître de Saint Paul aux Thessaloniciens, Saint Paul prie pour que notre « être tout entier, l'esprit, l'âme et le corps » soit gardé sans reproche à l'Avènement du Seigneur (1Th 5, 23).

L'Église enseigne que la distinction entre l'âme et l'esprit n'introduit pas une dualité dans l'âme. [3] Il faut noter qu'au IXe siècle, lors du IVe concile de Constantinople en 869, il y eut une controverse sur la relation entre l'âme et le corps. Le 11e canon de ce concile affirma l'unicité de l'âme. [4]

C'est donc au IXe siècle que l'on formalise la distinction entre l'âme et l'esprit. L'esprit étant traditionnellement associé à la pensée et l'âme au sentiment, on considérait auparavant que l'homme pouvait avoir une nature multiple (corps, âme et esprit). Le christianisme affirma au contraire l'unité de la personne humaine (un de corps et d'âme) en niant l'existence de l'esprit, car il est confondu avec l'âme :

« L'unité de l'âme et du corps est si profonde que l'on doit considérer l'âme comme la forme du corps ; c'est-à-dire, c'est grâce à l'âme spirituelle que le corps constitué de matière est un corps humain et vivant ; l'esprit et la matière, dans l'homme, ne sont pas deux natures unies, mais leur union forme une unique nature. » [5]

L'Église catholique a donc cherché à approfondir le sens des termes, ce qui n'est pas allé sans controverse entre l'Église de Rome et les Églises d'orient. Dans le catéchisme de l'Église catholique, la notion d'âme est attachée à un individu (unité de la personne humaine et de l'âme), tandis que l'esprit est considéré aussi sous un angle collectif :

« L'héritage sacré de la foi (depositum fidei), contenu dans la Sainte Tradition et dans l'Écriture Sainte a été confié par les apôtres à l'ensemble de l'Église. En s'attachant à lui, le peuple saint tout entier uni à ses pasteurs reste assidûment fidèle à l'enseignement des apôtres et à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières, si bien que, dans le maintien, la pratique et la confession de la foi transmise, s'établit, entre pasteurs et fidèles, une singulière unité d'esprit. » [6]

Ceci est particulièrement bien révélé dans l'introduction de l'encyclique Fides et ratio :

« La foi et la raison sont comme les deux ailes qui permettent à l'esprit humain de s'élever vers la contemplation de la vérité. C'est Dieu qui a mis au cœur de l'homme le désir de connaître la vérité et, au terme, de Le connaître lui-même afin que, Le connaissant et L'aimant, il puisse atteindre la pleine vérité sur lui-même. »

Le mot " esprit ", avec une minuscule (donc celui de l'homme), apparaît très souvent dans cette encyclique, alors que le mot " âme " n'apparait quà cinq reprises.

Le mot Esprit écrit avec une majuscule, ou figurant dans les appellations Esprit de vérité, Esprit d'adoption... (toujours avec une majuscule) désigne l'« Esprit saint ».

[modifier] Philosophie

Au XVIIe siècle, Descartes sépare le corps de l'esprit (qu'il identifie à l'âme) en un dualisme : le corps est une substance étendue et relève de la mécanique (d'où la théorie des animaux machines), tandis que l'âme est une substance pensante. En tant que passif, l'esprit est intellect ; en tant qu'actif, il est volonté. L'unité des deux reste un problème épineux, et Descartes voit dans la glande pinéale le lieu de communication entre les deux.

A contrario, les tenants du matérialisme philosophique refusent l'existence d'un principe immatériel et l'esprit est conçu comme la manifestation de phénomènes physiologiques régis par les lois de la physique : « le cerveau sécrète la pensée comme le foie sécrète la bile » (Pierre-Jean-Georges Cabanis, 1802).

La généralisation du paradigme moniste naturaliste dans les sciences de l'esprit, aujourd'hui connues sous le nom de sciences cognitives résumé dans la métaphore du cerveau-ordinateur conduit plutôt aujourd'hui à mettre entre le cerveau et l'esprit dans le même type de rapport que le matériel (« hardware ») et le logiciel (« software ») en informatique. Cette thèse connait aussi ses adversaires qui refusent de ne voir dans l'esprit qu'un épiphénomène de la neurobiologie.

Néanmoins cela ne décourage pas les chercheurs en sciences cognitives, pour lesquels le champ de "ce qui reste à expliquer dans le fonctionnement de l'esprit" est fini et se rétrécit d'année en année. Marvin Minsky dans son livre La société de l'Esprit (1985) présente ainsi une approche originale de l'esprit et de l'intelligence, qu'il voit comme un phénomène holiste, émergeant de l'interaction d'un très grand nombre d'agents inintelligents par eux-même.

[modifier] Autres traditions religieuses

[modifier] Bouddhisme

Contrairement à l'opposition binaire de la tradition chrétienne, le bouddhisme insiste sur les distinctions entre esprit, âme et soi, et le principe du karma.

[modifier] Sources

  1. Paul Foulquié, Dictionnaire de la langue philosophique, Presses Universitaires de France, Paris 1986
  2. Jacqueline Picoche, Le Robert, Dictionnaire étymologique du français, Paris 2006
  3. Catéchisme de l'Église catholique, numéro 367, voir les références complètes indiquées en notes de bas de page
  4. Consulter l'article IVe concile de Constantinople
  5. Catéchisme de l'Église catholique, numéro 365, page 84. Sur l'unité du corps et de l'âme, on peut aussi consulter Détré Jean-Marie, La réincarnation et l'Occident, tome 1 de Platon à Origène, Ed. Triades.
  6. Catéchisme de l'Église catholique, numéro 84

[modifier] Voir aussi

[modifier] Concepts

[modifier] Interprétations et prolongements


Notions philosophiques
Traductions provenant du Wiktionnaire
en français
esprit
en grec
πνεύμα
en latin
spiritus
en allemand
Geist
en anglais
spirit
en italien
spirito