Des fleurs pour Algernon

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Des fleurs pour Algernon
Auteur Daniel Keyes
Genre Science-fiction
Version originale
Titre original Flowers for Algernon
Éditeur original Harcourt Trade Publishers
Langue originale Anglais
Pays d’origine États-Unis États-Unis
Date de parution originale Avril 1959 (nouvelle)
Mars 1966 (roman)
ISBN original ISBN 0-15-131510-8
Version française
Traducteur Georges H. Gallet
Éditeur J'ai lu
Date de parution 1972
Type de média Broché
ISBN ISBN 2-27-712427-3
Collection Science-fiction
Cet article fait partie de la série
Science-fiction
La SF à l’écran
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Catégorie:science-fiction

Des fleurs pour Algernon (Flowers for Algernon en version originale) est une nouvelle ainsi qu'un roman de science-fiction, écrits par Daniel Keyes. La nouvelle a été publiée en 1959 et a remporté le prix Hugo de la meilleure nouvelle courte en 1960. Le roman a été publié en 1966 et a obtenu le prix Nebula du meilleur roman la même année.

Sommaire

[modifier] Présentation

Ce qui suit dévoile des moments clés de l’intrigue.

Charlie Gordon, un jeune arriéré mental, gagne sa vie comme apprenti dans une boulangerie. Il suit parallèlement des cours de lecture et d'écriture à l'Université Beekman avec Miss Kinnian. Un jour, il est convoqué par les Docteur Strauss et le Professeur Nemur pour subir une opération du cerveau qui doit permettre de démultiplier ses facultés mentales. L'intervention ayant réussi avec la souris de laboratoire dénommée Algernon, les deux scientifiques pensent être prêts à passer au stade de l'expérimentation humaine. Après l'opération, Charlie est suivi psychologiquement par les deux chercheurs et doit rédiger à cet effet son journal intime sous forme de comptes-rendus. Son ancien professeur, Miss Kinnian, l'accompagne dans son évolution. Charlie Gordon progresse rapidement, accumule de nombreuses connaissances, mais a beaucoup de mal à se lier des relations stables et normales avec ses congénères, faute d'avoir la maturité affective suffisante, mais aussi parce qu'il est obsédé par la compréhension de sa vie antérieure, celle du Charlie Gordon attardé mental, ce qui le conduira à revivre en pleine conscience les scènes les plus traumatisantes de son enfance. Malheureusement, la souris Algernon donne des signes inquiétants de dégénérescence cérébrale et finit par mourir. Charlie, qui sait fort bien que son sort est lié à celui d'Algernon, comprend qu'il va lui aussi régresser et s'empresse alors de reprendre tous les travaux scientifiques des professeurs Nemur et Strauss afin de trouver les erreurs de calcul permettant d'expliquer l'origine de cette dégénérescence. Rien ne peut être fait cependant et Charlie sombrera lentement, mais inexorablement, dans la débilité mentale de ses débuts où il vivra dans l'asile tant redouté depuis sa plus jeune enfance.

[modifier] Analyse et commentaire

[modifier] Analyse

[modifier] Intimité du journal

La forme littéraire du journal intime était le meilleur choix esthétique possible pour ce roman qui est d'abord le tableau dramatique d'un individu confronté à l'énigme de sa propre double identité. S'il n'est d'abord qu'un outil de travail médical imposé à Charlie Gordon par les professeurs Nemur et Strauss pour leur permettre de suivre l'évolution de son QI, Charlie finit par se l'approprier totalement et s'en sert de miroir et de confident. L'évolution intellectuelle de Charlie se manifeste aussi bien dans le contenu de plus en plus élaboré du journal que dans l'évolution même de sa maîtrise orthographique et grammaticale de la langue. Le lecteur lira les premiers "compte rendu" de Charlie cousus de fautes et écrits de manière quasiment phonétique et se rendra compte stylistiquement de l'évolution du personnage. La tournure tragique du récit n'apparaîtra qu'à la fin du roman, lorsque Charlie perdra peu à peu ses facultés mentales et ne pourra par conséquent plus lire et comprendre son propre journal intime, véritable mémoire de son autre Moi devenu à jamais inaccessible.

[modifier] Intelligence à double sens

Le développement du QI de Charlie Gordon a des conséquences évidentes d'un point de vue cognitif. Charlie assimile rapidement tout ce qu'il lit : il apprend avec une aisance incroyable de nombreuses langues étrangères, il est capable de débattre conceptuellement avec des professeurs d'Université spécialistes dans leurs domaines, se met à composer un concerto pour piano, etc. Mais Daniel Keyes étend également les facultés de Charlie dans le sens d'un approfondissement réflexif de la structure psychologique du Moi et dans le décodage psychanalytique des manifestations de l'inconscient : rêves, souvenirs censurés, actes manqués. Charlie Gordon va ainsi se servir de ses nouvelles facultés mentales pour explorer la vie antérieure de son double attardé mental afin d'en reconstituer le parcours existentiel et d'en découvrir les traumatismes. L'auteur fera d'ailleurs un usage plus qu'insistant des différents traumatismes psychanalytiques vécus par le petit Charlie Gordon dans sa cellule familiale, entre une mère honteuse d'avoir donné le jour à un dégénéré et un père protecteur mais faible.

L'intelligence est également l'enjeu d'un autre combat pour le nouveau Charlie Gordon : faire comprendre aux deux professeurs Nemur et Strauss que le premier Charlie Gordon, l'attardé mental au QI inférieur à 70, était une "personne" à part entière et non pas un semi-être humain heureusement ramené dans le cercle de l'humanité par les bienfaits de la science. C'est la prise de conscience du mépris des deux scientifiques pour son ancien Moi dégénéré qui empêche Charlie de leur témoigner toute sa reconnaissance. Il n'est pas simplement le surhomme de demain, né d'un laboratoire de recherche en neurobiologie, il aspire à la reconnaissance sans aucune restriction de toute forme de vie humaine. De plus on peut constater qu'il y a un rapport évident entre l'incrédulité de Charlie (retardé) qui est comparé à un innocent au sens religieux et "diabolique" en "surhomme".

[modifier] Place de l'amitié

Daniel Keyes suggère dans son roman un étonnant rapport géométrique entre l'amitié et l'intelligence obsédée par elle-même : les témoignages d'amitié sincère que reçoit Charlie semblent être inversement proportionnels à son degré d'intelligence. C'est le lancinant constat que fait Charlie Gordon pendant toute son évolution mentale : « Quand j'étais arriéré, j'avais des tas d'amis. Maintenant, je n'en ai pas un. » (p. 204). Le lecteur se rend compte à la fin du roman que les vrais amis de Charlie sont ceux qui, au départ, se moquaient le plus de lui et de sa gaucherie : ses collègues de la boulangerie qui l'accueilleront à bras ouvert lorsqu'il aura régressé.

Charlie Gordon se rend compte que "bête" ou "intelligent", il est soumis à la même soif d'affection et d'amour. Mais cette affection et cet amour, il a beaucoup de mal à les trouver quand son QI dépasse celui de la moyenne des gens qu'il rencontre. Il nourrit une certaine arrogance face à des gens cultivés qu'il trouve finalement peu intelligents, et ne réussit même plus à comprendre leur fonctionnement psychologique et social tellement il est centré sur lui-même. Son plus gros problème reste cependant cette énigme qu'il est devenu à lui-même et qui devient une obsession, le conduisant presque au stade de la folie schizophrénique, persuadé qu'il est sans cesse observé par l'autre Charlie, l'arriéré. Sa régression, si touchante et dramatique soit-elle, constitue presque une sorte de libération, comme une happy end pleine d'ambiguïtés.

[modifier] Critiques

Dans son Histoire de la science-fiction moderne, Jacques Sadoul déclare à propos de ce roman: « C'est là une œuvre d'une poignante beauté, un récit humain et désespéré. ».[1]

[modifier] Importance de l'œuvre

Ce roman est considéré comme un grand classique de la science-fiction dans les ouvrages de références suivants:

  • Jacques Sadoul, Anthologie de la littérature de science-fiction, Ramsay, 1981
  • Lorris Murail, Les Maîtres de la science-fiction, Bordas, coll. « Compacts », 1993
  • Stan Barets, Le science-fictionnaire, Éditions Denoël, coll. « Présence du futur », 1994
  • Isaac Asimov, Moi, Asimov, Éditions Denoël, coll. « Folio SF », 2004

[modifier] Prolongements

[modifier] Adaptations

[modifier] Influences

  • Bien qu'officiellement inspiré d'une nouvelle de Stephen King, l'intrigue du film Le Cobaye (The Lawnmower Man) de Brett Leonard (1992) présente de nombreuses similitudes avec Des fleurs pour Algernon. Dans ce film, Jobe, le personnage principal, également arriéré mental, verra ses facultés mentales décuplées grâce à la modélisation informatique de son esprit.
  • Plusieurs épisodes de la série Les Simpson sont explicitement inspirés de ce récit. L'un d'eux est Le Cerveau (HOMR), dans lequel Homer Simpson tient le rôle d'Algernon. Le titre original de cet épisode se réfère d'ailleurs au logo américain du film Charlie. Un épisode antérieur place également Lisa Simpson dans une situation analogue, lui faisant rédiger notamment le journal intime de sa dégénérescence intellectuelle.

[modifier] Citations

  • « Quand j'étais arriéré, j'avais des tas d’amis. Maintenant, je n'en ai pas un. »
  • « Plus tu seras intelligent, plus tu auras de problèmes, Charlie. »
  • « Je suis un être humain, une personne, avec des parents et des souvenirs et une existence - et je l'étais avant que vous me poussiez sur un chariot dans la salle d'opération ! »
  • « L'intelligence sans la capacité de donner et de recevoir une affection mène à l'écroulement mental et moral, à la névrose, et peut-être même à la psychose. »
  • « Et je dis que l'esprit qui n'a d'autre fin qu'un intérêt et une absorption égoïstes en lui-même, à l'exclusion de toute relation humaine, ne peut aboutir qu'à la violence et à la douleur. »
  • « Tu ne sais pas ce que c'est d'avoir quelque chose qui se passe en toi, que tu ne peux ni voir ni contrôler, et de sentir que tout te file entre les doigts. »

[modifier] Notes et références

  1. Jacques Sadoul, Histoire de la science-fiction moderne (1911-1984), Robert Laffont, coll. « Ailleurs et demain », 1984, 231 p.
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Prix Nebula du meilleur roman, ex-æquo avec Babel 17 de Samuel Delany
1966
L'Intersection Einstein, de Samuel Delany