Afro-Américains

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Les Afro-Américains[1] ou Noirs américains sont les habitants des États-Unis ayant des ancêtres Noirs d'Afrique. La grande majorité des Afro-Américains sont descendants des esclaves déportés entre les XVIe et XIXe siècles.

Popularisée par Malcolm X dans les années 1960, l’expression African American est devenue d'un usage commun aux États-Unis à la fin des années 1980. Son but était de définir les Américains de couleur de peau noire par une origine, comme le sont les citoyens qui ont une origine italienne ou irlandaise, et non plus uniquement par leur couleur. Cette catégorie est retenue par le bureau du recensement pour élaborer les formulaires officiels destinés à préparer des statistiques ou à accompagner des politiques de discrimination positive.

Sommaire

[modifier] Histoire

Icône de détail Article détaillé : Histoire des Afro-Américains.

[modifier] Époque coloniale

Benjamin Banneker (1731-1806), astronome et éditeur américain, fils d'esclave
Benjamin Banneker (1731-1806), astronome et éditeur américain, fils d'esclave
Icône de détail Article détaillé : Esclavage aux États-Unis.

Les premiers esclaves africains débarquent au début du XVIIe siècle dans les colonies anglaises d'Amérique du Nord. Dès cette époque, on peut observer des métissages avec les Blancs. Pendant la guerre d'indépendance américaine, des soldats africains, qu'ils soient esclaves ou libres, ont participé au conflit dans les deux camps, loyalistes et insurgés. On estime que 5 000 Africains ont combattu aux côtés des Américains[2] et plusieurs d'entre eux furent affranchis[3]. En 1779, environ 10 000 Noirs ont rejoint les rangs de l’armée anglaise[4].

La Révolution américaine plaça au cœur des débats politiques la place et le statut des Africains dans la société. Les Noirs ont obtenu une émancipation relative dans les états du centre (Philadelphie) et en Nouvelle-Angleterre[5]. L'esclavage est aboli en 1777 dans le Vermont[6], en 1780 en Pennsylvanie[7], en 1783 dans le Massachusetts[8].

Le Congrès continental discuta intensément de l'esclavage. Thomas Jefferson, dans la Déclaration d'indépendance américaine, préféra ignorer le sujet, afin de ne pas mécontenter les régions du Sud qui vivaient de l'économie de plantation. Si la Constitution américaine fondait les bases démocratiques de la nouvelle République, elle excluait les Noirs du droit de vote, de même que les femmes, les Amérindiens et les pauvres.

Icône de détail Article détaillé : Thomas Jefferson et l’esclavage.

[modifier] L'abolition de l'esclavage

Icône de détail Article détaillé : Abolition de l'esclavage.
Égrénage du coton en 1869
Égrénage du coton en 1869

Dès 1770, les sociétés Quakers de Nouvelle-Angleterre s'interdisent toutes pratiques esclavagistes. Seuls quelques États du Nord s'engagent rapidement dans la voie de l'abolition de l'esclavage : le Vermont l'interdit dès 1777[9]. En 1807, la traite des noirs est officiellement abolie aux États-Unis. Dans les années 1820, la Female Anti-slavery Society dénonce l'esclavage. En 1865 est promulgué le 13e amendement interdisant l'esclavage, après la guerre de Sécession.

[modifier] La ségrégation

Après 1865, un grand nombre d'anciens esclaves se retrouvent sans travail et de nombreux planteurs font faillite. Commence alors un exode massif des Afro-américains vers les villes industrielles du Nord du pays. La Guerre de Sécession laissa des rancœurs dans les États du Sud : après la fin de l'occupation militaire est mise en place la ségrégation par peur du métissage et par la psychose du viol des femmes blanches par les hommes africains[10]. Les lois Jim Crow instaurent le développement séparé mais égal, c'est-à-dire la ségrégation dans les lieux publics. Les Noirs sont également victimes de violences, de lynchages et de la haine du Ku Klux Klan.

[modifier] Les droits civils et la marche vers l'égalité

Martin Luther King
Martin Luther King

Les premières mesures contre la ségrégation sont prises dans les États du Nord après la Seconde Guerre mondiale, compte-tenu de l'effort de guerre soutenu par les Afro-américains dans l'armée du pays. En 1949, l'armée entre dans une phase de déségrégation totale[11].

Grâce aux efforts de l'avocat afro-américain Thurgood Marshall et du NAACP, la ségrégation scolaire est déclarée inconstitutionnelle par la Cour suprême des États-Unis en 1954 (arrêt Brown v. Board of Education). Les autres lois Jim Crow ont été abolies par le Civil Rights Act de 1964 et le Voting Rights Act.

Les années 1960 sont marquées par la figure de Martin Luther King (1929-1968) qui organisa et dirigea des marches pour le droit de vote, l'emploi des minorités, et d'autres droits civiques élémentaires pour les Afro-américains. Il est surtout connu pour son discours « I have a dream » (J'ai un rêve), prononcé le 28 août 1963 devant le Lincoln Memorial à Washington durant la marche pour l'emploi et la liberté. Il rencontre John F. Kennedy qui lui apporte un grand soutien pour la lutte contre la discrimination raciale. La déségrégation prend une tournure violente avec de nombreux assassinats, des émeutes dans certaines villes et dans les ghettos : entre 1965 et 1968, les violences font 250 morts et 8 000 blessés dans tout le pays. En 1968, un rapport de la commission Kerner s'intéresse aux causes de ces violences et représente le point de départ de la politique de discrimination positive.

[modifier] La discrimination positive (affirmative action)

Icône de détail Article détaillé : Discrimination positive.

Le premier à utiliser l'expression Affirmative action est le président américain John Fitzgerald Kennedy[12] ; elle fut ensuite reprise par son successeur à la Maison Blanche, Lyndon Johnson. Leur idée était que, malgré les lois en faveur de l'égalité, les Noirs resteraient en retard par rapport au reste de la population américaine. Le but était de faire en sorte que les Noirs soient davantage représentés dans les emplois qualifiés, les universités, les médias, etc. Dès les années 1960, des emplois préférentiels sont mis en place. Mais il ne s'agit en aucun cas d'une politique de quotas : en 2003, la Cour Suprême a condamné le principe des quotas comme étant contraire à l'égalité devant la loi et à la libre concurrence[13]. Les résultats sont jugés convaincants aux États-Unis : en 1960, 13 % des Afro-Américains appartenaient aux classes moyennes, ils sont 66 % en 2000[14]. Les disparités ethniques sont d´ailleurs beaucoup plus fortes en Amériques latine qui a pourtant une réputation de métissage. Néanmoins les Noirs et les Amérindiens (natives) occupent bien jusqu´à aujourd'hui le bas de l´échelle sociale. Ils restent encore de nombreux ghettos, où 50 % des enfants grandissent sans père. Souvent encore les Afro-américains restent incompris, méprisés ou isolés. Les discriminations judicaires sont nombreuses (12 % de la population et 44 % de la population en prison[réf. nécessaire]) et les mariages mixtes rares.

[modifier] Démographie

Le recensement n'est pas obligatoire aux États-Unis[15]. La mention de la race est facultative sur les formulaires : chacun est libre de cocher ou non les cases concernant l'appartenance ethnique ou linguistique (par exemple pour le groupe hispanique). D'ailleurs, la race n'est indiquée sur aucun document d'identité (permis de conduire, carte de sécurité sociale ou passeport). Il est également possible de choisir plusieurs origines ethniques pour représenter son métissage depuis le recensement 2000[16].

Ceux dont les ancêtres ont été transportés en qualité d’esclaves d’Afrique aux Caraïbes ou en Amérique latine, mais qui sont venus aux États-Unis en personnes libres, se classent eux-mêmes dans la catégorie Afro-américains ou dans une autre catégorie qui peut être latino-américain, haitiano-américain ou caraibéen-américain.

Selon l'estimation officielle de 2005, environ 39,9 millions d'Afro-américains vivent au États-Unis soit 12,9 % de la population totale. 54,8 % résident dans les États du Sud, 17 6 % dans le Nord-Est, 18,7 % dans le Midwest et seulement 8,9 % dans les États de l'Ouest. 88 % vivent dans des aires urbaines. Avec plus de deux millions de résidents noirs, New York City a la plus importante population noire urbaine des États-Unis. Parmi les villes de plus de 100 000 habitants, Gary dans l'Indiana a le plus fort pourcentage d'habitants noirs (84 %), suivi de peu par Détroit dans le Michigan (82 %). La Nouvelle-Orléans en Louisiane (67 %), Baltimore dans le Maryland (64 %), Atlanta en Géorgie (61 %) et Washington, D.C. (60 %) sont aussi des centres importants de population noire. Aujourd'hui les États-Unis sont le quatrième pays où il y a le plus de Noirs (en incluant les métis) après le Nigeria, le Congo démocratique et le Brésil[réf. nécessaire].

Année Nombre Pourcentage de la population totale
1790 757 208 19,3% (plus haut pourcentage historique)
1800 1 002 037 18,9%
1810 1 377 808 19,0%
1820 1 771 656 18,4%
1830 2 328 642 18,1%
1840 2 873 648 16,8%
1850 3 638 808 15,7%
1860 4 441 830 14,1%
1870 4 880 009 12,7%
1880 6 580 793 13,1%
1890 7 488 788 11,9%
1900 8 833 994 11,6%
1910 9 827 763 10,7%
1920 10 500 000 9,9%
1930 11 900 000 9,7% (plus bas pourcentage historique)
1940 12 900 000 9,8%
1950 15 000 000 10,0%
1960 18 900 000 10,5%
1970 22 600 000 11,1%
1980 26 500 000 11,7%
1990 30 000 000 12,1%
2000 36 600 000 12,3%

Source : Recensements US. L'estimation est de 12,9% pour 2005 [1]

[modifier] Culture

Le terme « afro-américain » est également utilisé pour désigner la culture noire américaine, comme en musique, qui est en fait un ensemble de cultures, mélange des influences africaines, européennes et américaines, développée par cette population d’origine africaine. Le jazz est une musique afro-américaine, tout comme d'autres musiques d'Amérique latine, notamment celles de Cuba et du Brésil, où les descendants des esclaves importés d'Afrique ont inventé des folklores originaux, des pas de danse et des mélodies populaires.

Icône de détail Article détaillé : Musique noire américaine.

[modifier] Littérature

Icône de détail Article détaillé : Littérature noire américaine.

Phyllis Wheatley, (1753-1784) a vécu à Boston ; elle est considérée comme la première poétesse afro-américaine des États-Unis. En 1770, elle écrivit un hommage poétique au calviniste George Whitefield, qui eut une large audience à Boston. Benjamin Banneker, un mathématicien et inventeur noir affranchi, écrit plusieurs traités et lettres.

  • Pendant le New Deal, le gouvernement fédéral cherche à reconstituer la mémoire collective des esclaves noirs dans le cadre de la WPA (Writers’ Project Administration).

[modifier] Articles connexes

[modifier] Notes

  1. Aux États-Unis, on écrit African American et surtout pas « African-American »), selon le principe du no hyphen : le trait d'union serait en effet considéré comme particulièrement péjoratif. En français, on utilise les expressions « Noir américain » ou « Africain-Américain »
  2. Sidney Kaplan and Emma Nogrady Kaplan, The Black Presence in the Era of the American Revolution, pp. 64-69
  3. Nicole Bacharan, Faut-il avoir peur de l’Amérique ? , Paris, éditions du Seuil, 2005, ISBN 2020799502, p.117
  4. Élise Marienstras, Naomi Wulf, Révoltes et révolutions en Amérique, Atlande, 2005, p.94
  5. Élise Marienstras, Naomi Wulf, Révoltes et révolutions en Amérique, Atlande, 2005, p.94
  6. Jacques Binoche, Histoire des États-Unis, p.103 ; B. Cottret, La Révolution américaine..., 2003, p.425
  7. B. Cottret, La Révolution américaine..., 2003, p.425 ; Bernard Vincent, La Révolution américaine 1775-1783, Nancy, Presses Universitaires de Nancy, 1985, tome 2, (ISBN 2864802112), p.11
  8. Bernard Vincent, La Révolution américaine 1775-1783, Nancy, Presses Universitaires de Nancy, 1985, tome 2, (ISBN 2864802112), p.12
  9. Jacques Binoche, Histoire des États-Unis, p.103 ; Nicole Bacharan, Faut-il avoir peur de l’Amérique ? , Paris, éditions du Seuil, 2005, ISBN 2020799502, p.117
  10. Nicole Bacharan, Faut-il avoir peur de l’Amérique ? , Paris, éditions du Seuil, 2005, ISBN 2020799502, p.128
  11. Nicole Bacharan, Faut-il avoir peur de l’Amérique ? , Paris, éditions du Seuil, 2005, ISBN 2020799502, p.131
  12. Nicole Bacharan, Faut-il avoir peur de l’Amérique ? , Paris, éditions du Seuil, 2005, ISBN 2020799502, p.137
  13. Nicole Bacharan, Faut-il avoir peur de l’Amérique ? , Paris, éditions du Seuil, 2005, ISBN 2020799502, p.138
  14. Nicole Bacharan, Faut-il avoir peur de l’Amérique ? , Paris, éditions du Seuil, 2005, ISBN 2020799502, p.140
  15. Nicole Bacharan, Faut-il avoir peur de l’Amérique ? , Paris, éditions du Seuil, 2005, ISBN 2020799502, p.144
  16. Sylvie Kauffmann, « Le prochain visage de l'Amérique », dans Le Monde du 19/11/2006, [lire en ligne]