Écoulement de Poiseuille

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La loi de Poiseuille est nommée à partir des travaux de Jean-Louis-Marie Poiseuille, médecin et physicien français du XIX siècle [1].


Un fluide visqueux, s'il est en écoulement lent dans un tuyau de petit diamètre ou entre deux plaques proches, est en écoulement de Stokes.

En première approximation, si le tuyau est cylindrique ou que les plaques sont parallèles, l'écoulement du fluide est partout parallèle aux parois (approximation de lubrification).

Le frottement aux parois implique qu'aux échelles macroscopiques, la vitesse du fluide y est nulle (condition de non-glissement).

Par ailleurs, la pression ne varie pas dans l'épaisseur de l'écoulement (approximation de lubrification).

Ces trois conditions impliquent que l'écoulement s'organise selon un champ de vitesse parabolique : vitesse nulle aux parois et maximale à mi-hauteur.

Ci-dessous, on considère deux problèmes différents qui donnent lieu à un écoulement de Poiseuille :

  • l'écoulement dans un tube de section circulaire et de rayon constant R,
  • l'écoulement entre deux plaques planes et parallèles, distantes de h ; ce calcul permet notamment d'évaluer la force entre deux objets (par exemple deux disques) immergés dans un fluide visqueux et s'approchant à une vitesse donnée.

On notera par ailleurs que

  • Un cas particulier qui découle des précédents est celui de l'écoulement visqueux d'une couche mince sur une plaque, tel que la surface supérieure est libre (problème voisin des problèmes en canal découvert). Dans ce cas, le cisaillement est nul à la surface supérieure, et le profil de vitesse est le même que celui obtenu pour un écoulement entre deux plaques, mais en ne considérant que la moitié du profil entre une des plaques, et le milieu. En résumé, Poiseuille avec une plaque, c'est "la moitié de Poiseuille avec deux plaques".
  • la nature parabolique des vitesses dans l'écoulement de Poiseuille provient du fait qu'on néglige les cisaillements autres que le long du tuyau (ou des plaques). Les couches de fluides sont supposées s'écouler parallèles les unes aux autres dans le tuyau, en sorte que la seule composante de la dérivée de la vitesse est la dérivée de la vitesse longitudinale (parallèle aux parois), prise le long de la section verticale. Cependant, cette approximation de vitesse parallèles à l'axe longitudinal, et ne variant que suivant l'axe transversal peut s'étendre au cas d'un solide. Taylor a fait remarquer qu'un solide incompressible, poussé entre deux plaques, satisfait aux mêmes hypothèses que l'écoulement de Poiseuille. Cependant, dans ce cas, ce n'est pas la vitesse qui varie paraboliquement, mais la déformation. Ainsi, un solide poussé dans un tuyau ou entre deux plaques aura un profil de déformation "de Poiseuille", solide, et réversible (élastique).

Sommaire

[modifier] Champ de vitesse dans un tube

La vitesse est parallèle à l'axe du tube (noté z) :  \vec{v} = v \vec{u}_z .

Équation du profil de vitesse :

 v(r,z,\theta) = v(r) = v_{\rm max}\;\left( 1-\frac{r^2}{R^2} \right)

où la vitesse maximale (au centre du tube) est liée au gradient de pression, à la viscosité et au rayon :  v_{\rm max} = \frac{R^2}{4\;\eta} \; \frac{{\rm d} p}{{\rm d} z}

La démonstration de ce résultat est donnée plus bas.

[modifier] Champ de vitesse entre deux plaques

On suppose que le gradient de pression est orienté selon l'axe x et que la normale aux plaques est orientée selon z, avec les plaques situées en  z = \pm h/2. La vitesse est alors parallèle aux plaques, et plus précisément orientée selon l'axe x :  \vec{v} = v \vec{u}_x .

Équation du profil de vitesse :

 v(x,y,z) = v(z) = v_{\rm max}\;\left( 1-\frac{4\,z^2}{h^2} \right)

où la vitesse maximale (au milieu de la couche) est liée au gradient de pression, à la viscosité et à la distance entre les plaques :  v_{\rm max} = \frac{h^2}{8\;\eta} \; \frac{{\rm d} p}{{\rm d} x}

La démonstration de ce résultat est similaire à celle donnée ci-dessous dans le cas du tube circulaire.

[modifier] Démonstration (dans le cas du tube)

1. Par symétrie, l'écoulement ne varie ni en z, ni en θ :

v(r,z,θ) = v(r)


2. Par conséquent, les seuls efforts de cisaillement sont des forces selon z transmises radialement (selon r) :

 \sigma_{rz}(r,z,\theta) = \sigma_{rz}(r) = \eta\;\frac{{\rm d} v(r)}{{\rm d} r}

3. Par symétrie également, la variation de la pression est constante le long de l'axe z :

 \frac{{\rm d} p}{{\rm d} z} = {\rm const}


4. Considérons les efforts subis par une zone cylindrique de rayon r et de longueur Δz.

Les efforts de pression sur les deux faces circulaires du cylindre ont une résultante égale à :

 F_{\rm faces} = \pi\,r^2 \; \Delta z \; \frac{{\rm d} p}{{\rm d} z}

Les contraintes de cisaillement sur le bord du cylindre lui transmettent une force orientée selon son axe z :

 F_{\rm bord} = 2\pi\,r \; \Delta z \; \sigma_{rz}(r)

La force totale exercée sur le cylindre de liquide est nulle puisque l'écoulement est permanent. Ainsi :

 \sigma_{rz}(r) = \frac{r}{2} \; \frac{{\rm d} p}{{\rm d} z}


5. Il s'ensuit que le gradient de vitesse est linéaire en r :

 \frac{{\rm d} v(r)}{{\rm d} r} = \frac{\sigma_{rz}(r)}{\eta}
= \frac{r}{2\;\eta} \; \frac{{\rm d} p}{{\rm d} z}


6. Autrement dit, le champ de vitesse est parabolique :

 v(r) = {\rm const} + \frac{r^2}{4\;\eta} \; \frac{{\rm d} p}{{\rm d} z}


7. Compte tenu de la condition de non-glissement (v(R) = 0) :

 v(r) = -\frac{R^2}{4\;\eta} \; \frac{{\rm d} p}{{\rm d} z} 
\; \left( 1-\frac{r^2}{R^2} \right)

La vitesse est plus importante au centre du conduit malgré le signe négatif, étant donné que la vitesse est orientée à l'encontre du gradient de pression. Écoulement dans le sens positif pour un gradient négatif... CQFD

[modifier] Références

  1. Poiseuille, "Le mouvement des liquides dans les tubes de petits diamètres", 1844

Taylor GI, Proceedings of the twelfth international congress of applied mathematics, New York: Springer Verlag, 1969. Boudaoud A., Saharaoui C., Singular thin viscous sheet, Phys. Rev. E., 2001;64:050601(R).